Trauma ¤ Feulement & Pelote - end

Le domestique, un peu plus vif depuis qu'il pouvait respirer, protesta d'une voix plaintive et enfantine, emplie de remord:

" Hé jt'ai jamais attaqué de mon plein grès! "

Couard, il n'en croyait pas un mot. Malhonnête il essayait probablement de fuir en rampant sous un mensonge embelli qui devait l'innocenter maintenant qu'il réalisait son erreur. "Pelote" l'avait renversé et il en fallait de la force pour renverser le lieutenant, il était arrivé à toute vitesse, s'était probablement jeté sur lui. Par "accident" hein ?

Il y avait quelque chose dans son ton larmoyant qui piqua les souvenirs du charcoal une nouvelle fois. Lorsqu'il le sentit un petit peu trop remuer, ou peu-être l'imagina t-il simplement, il ajouta plus de force à sa prise.

Leurs regards se croisèrent enfin réellement. L'émeraude n'était plus ternie par le voile de l'inconscience proche, ravivé par l'adrénaline et l'essence de la peur, la culpabilité d'une erreur. C'était le siens. C'était le siens.

Le colosse contracta ses doigts, lames meurtrières menaçant avec chaques secondes naissantes de percer à nouveau le cuir du pauvre misérable.

" t'es pas Pelote. "

Souffla t-il.

" Déchet. Déchet ! Tu n'es- Ils avaient dit qu'ils vous avaient tous crevés ! "

Cracha t-il.

" Combien d'entre vous traînent encore dans la forêt ?! "

La colère et la peur faisaient place à la paranoïa, le choc de savoir que les fantômes de ses plus sombres cauchemars foulaient encore la terre. Que peu-être que tout recommencerait, que cette fois ils lui prendraient son père. Esprit Soucieux ... Et peu-être même sa propre vie.

A mes mots, ses griffes s’enfoncèrent un peu plus dans ma peau, me faisant lâcher un glapissement de stupeur. Elles n'avaient pas encore pénétré ma chair, mais à ce rythme cela ne saurait tarder. Mes oreilles s'abaissèrent, et ma gorge se noua. Mon attitude de soumission n'avait jamais cessé. Je restais sans bouger sous lui, sans opposer la moindre résistance. Dans un souffle, il insinua que je mentais. Que je n'étais pas moi. Comment est-ce-que je pouvais ne pas être moi? Mais je n'eus pas le temps de m'interroger davantage qu'il s'énerva:

" Déchet. Déchet ! (mon coeur rata un battement) Tu n'es- Ils avaient dit qu'ils vous avaient tous crevés ! "

Son pelage s'était à nouveau gonflé, et ses pupilles s'étaient rétractées à deux fentes, comme s'il voulait atomiser l’entièreté de mon corps. Déchet. Plus personne ne m'avait appelé comme ça depuis des lunes. Mon visage s'assombrit. Les muscles de ma tête se contractèrent, mes lèvres se plissèrent, et mes oreilles s'écrasèrent encore davantage sur mon crâne. J'avais rompu le contact avec son regard, et baissais les yeux maintenant. Comme si j'avais fait une faute. J'étais fautif d'être né au mauvais endroit. J'étais fautif d'être faible et je devais -

" Combien d'entre vous traînent encore dans la forêt ?! "

Non je ne devais pas. C'était fini. Je marmonnais pour moi-même que je leur appartenais pas. J'avais des amis maintenant. Les Lunar Pods s'en foutaient des amis. Les Lunar Pods faisaient régner la loi du plus fort. Je m'en étais défaite. J'avais des amis maintenant. Je répétais, plus fort, fixant le vide :

"Je... j'ai des amis maintenant!"

Je plantai soudainement mon regard dans le sien. C'était la seule chose en laquelle je croyais. Mes yeux brillaient.

"Je suis Pelote maintenant. Et je leur appartiens pas. Plus. "

Et puis, maintenant que ma parole s'était libérée, je rajoutais, pour répondre à sa question :


"Et j'en sais rien j'en ai jamais vu d'autres. Jme suis enfui lors de la bataille rouge pour être libre. Pour avoir des amis."

Oui, pour moi, devenir un domestique était ma liberté. Et je réussissais ce que j'avais entrepris. Perce Neige, Rusty, Belle de Nuit, Orage d'Or et tant d'autres étaient devenus mes vrais amis.

N'est-il pas beauuuu? Merci Trash

Pelote:

Déchet:

La soumission du domestique était totale et c'était bien la seule chose qui retenait inconsciemment le géant de l'abimer plus qu'il ne l'avait déjà fait. Oh que les rôles avaient changés depuis leur misérable enfance.

" Je... j'ai des amis maintenant! "

Son regard vide fut prit d'une nouvelle lueur de vie, comme si ses propres mots lui avaient servis d'encouragements. Mais dans ce scintillement aucune agressivité ne pouvait être lu, aucune colère n'avait jamais brillé dans l'émeraude de ses yeux.

" Je suis Pelote maintenant. Et je leur appartiens pas. Plus. "

Lorsqu'il assurait s'être détaché des Lunar Pods il semblait profondément sincère. C'était fort probable aussi car l'ombreux s'était lui-même libéré de la lune. Enfin, pas entièrement. Il ne pourrait jamais oublier les marques invisibles (et visibles) que les illuminés avaient laissés sur son corps et sur son âme mais il pouvait apprendre à vivre avec. Essayer. Il s'y efforçait. N'avait point d'autres options que d'avancer et de guérir.

Il est toujours plus simple de se réfugier dans son malheur et de s'abandonner à la violence, à l'amertume, à la colère, mais la véritable force vient de ce qui se relève. Ceux qui changent et apprennent de leurs erreurs. Grandir n'est pas qu'une question d'âge et de taille. De sages paroles don l'orphelin n'avait pas vraiment conscience mais don il appliquait la doctrine dans le simple but de mener une existence plus simple.

" Et j'en sais rien j'en ai jamais vu d'autres. Jme suis enfui lors de la bataille rouge pour être libre. Pour avoir des amis. "

Le lieutenant plissa des yeux, peinant à se faire une raison, peinant à faire confiance, même s'il avait une preuve juste à côté de lui: Le collier arraché de Pelote. Mais il ne le voyait plus, l'avait oublié, trop focalisé sur les milles pensées et questions qui secouaient son âme.

" Comment est-ce que j'peux te croire. "

Siffla t-il.

Mais le félin ne me croyait pas. Il gardait un regard suspicieux et me demanda une preuve. Comment pouvait-il me croire? Je réfléchis quelques instants, et commençais à déblatérer tout ce qui me passait par la tête.

"Ben ben je ne sais pas me battre. Je ne me suis jamais battu. Je ne t'ai jamais opposé de résistance. Alors, pourquoi t'aurais-je attaqué? J'exècre la violence. "

Je repensais à ce BOUM : je courais, seul, puis BOUM puis nous étions tous les deux à rouler sur la terre. Comment ? Pourquoi? Je secouai la tête.

"On a du se rentrer dedans par inadvertance."

Mais je pressentais que ces explications ne suffiraient pas. Ma mâchoire se serra. Comment prouver que je n'appartenais plus aux lunars? Mes souvenirs refirent surface à nouveau, et je revis toute ma fuite. Je m'avais pris les jambes à mon cou. Ce chat bicolore me poursuivait puis m'a laissé. J'avais cherché longtemps Perce Neige. Je l'avais trouvée. Et après j'étais allée chez mes bipèdes... Ils m'avaient soignés et... Bingo!

"J'ai un collier de domestique. Je suis chez eux depuis la dissolution des lunars quasiment. C'est pour ça que mes cicatrices sont si bien soignées, ils ont pris soin de moi. Et que je suis si gros avec moins de muscle. "

Bon, maintenant cela se voyait beaucoup moins vu que mon pelage était imbibé de sang, poisseux, visqueux. Je levais des yeux emplis d'espoir. Allait-il me croire?

N'est-il pas beauuuu? Merci Trash

Pelote:

Déchet:

La boule sombre de poils et de sangs en dessous de lui se mit à s'emporter dans un torrent de paroles justificatives, défendant sa cause mais surtout défendant sa vie.

" Ben ben je ne sais pas me battre. Je ne me suis jamais battu. Je ne t'ai jamais opposé de résistance. Alors, pourquoi t'aurais-je attaqué? J'exècre la violence. "

Un feu de colère enflamma sa poitrine. Je ne me suis jamais battu ? Alors d'où venaient les cicatrices qui balafraient son museau ! Il fallait être vachement con pour mentir au visage du premier concerné. Cette ordure se foutait ouvertement de sa gueule.

" On a du se rentrer dedans par inadvertance. J'ai un collier de domestique. Je suis chez eux depuis la dissolution des lunars quasiment. C'est pour ça que mes cicatrices sont si bien soignées, ils ont pris soin de moi. Et que je suis si gros avec moins de muscle. "

Ces excuses là, elles, tenaient la route mais ce n'était pas pour autant que le lieutenant accordait une quelconque confiance à Déchet. Sa fourrure, toujours dressées sur son échine et le reste de son corps refusait de s'abaisser, sa queue fouettait l'air d'anxiété, ses griffes piquaient toujours la peau du fantôme de ses cauchemars.

" Tu mens. "

Vociféra t-il comme s'il vomissait le poison qui infectait ses veines depuis maintes lunes.

" Tu sais te battre, tu t'es déjà battu, tu m'as marqué à vie enfoiré ! "

Pourtant, mes propos ne calmaient pas la fureur qui habitait les prunelles du combattant. Il ne me faisait pas confiance. Il ne voulait pas me faire confiance. Ma mâchoire se contracta, et l'anxiété commença doucement à étreindre ma trachée et mon coeur.

" Tu mens. " cracha-t-il. Ma gorge se noua encore davantage. Tous les signaux de danger se rallumèrent, un par un. Allait-il finir par me lâcher, ou ...allait-il me tuer ? Il me maintenait encore fermement, je pouvais toujours sentir ses griffes qui ne cessaient pas de s'enfoncer dans ma peau.

" Tu sais te battre, tu t'es déjà battu, tu m'as marqué à vie enfoiré ! "

Un sentiment nouveau s'empara de moi. Le sentiment d'injustice. Au temps des Lunars, je n'avais jamais ressenti cela puisque je n'avais jamais pu me comparer à d'autres situations. Je n'avais fait qu'accepter ma situation et subir. J'essayais tant bien que mal de répondre, tendu:

"Avais-je le choix... J'eus du mal à continuer. Je repoussais de toutes mes forces les souvenirs de ce moment qui remontait. Cette intense concentration se traduisait par mes yeux qui s'étaient refermés, par mes paupières qui se contractaient le plus fort possible. Comme si cela avait un quelqueconque impact sur la mémoire, une contraction des paupières. Ridicule. Si je ... La pelisse horrible de l'abbesse se dessina dans mon champ de vision. Je glapis, et ouvris brutalement les yeux. Je les levais pour fixer le ciel, comme pour me donner du courage. La lune n'était plus. La lune n'était plus. Elle n'était plus!!
Si je t'avais vraiment cogné j'aurais été exempté de ma situation de souffre-douleur et tu ne serais pas là à me faire du mal." lâchais-je, en un souffle.

Je baissais les yeux, las. Pourtant, j'étais là, à être pourri par les autres comme lui. A lutter pour avoir de la nourriture. Pourtant, il était arrivé de nombreuses fois que l'on se recroise.. Si j'avais de la nourriture et qu'il m'approchait, c'était sans doute pour me la prendre, alors je ne faisais pas d'histoires et la lui laissais. J'essayais alors de continuer à me justifier:

"Or si tu te souv- ... Non... ne te rappelle pas. Ces souvenirs sont le mal. Ce n'est pas grave."

Je secouais la tête. Les larmes commençaient doucement à perler en coin. J'aurais bien aimé devenir son ami maintenant que nous étions libre. Je posais sur lui des yeux doux.

"Je suis désolé pour tout ça."

tout ça comprenait cette séance de torture. J'étais un chaton ce jour là moi aussi. Il était toutefois plus jeune que moi encore. Je crois que je me souviendrais toute ma vie de la peur que j'avais ressenti. De la terreur pure que Cyanure se délectait de me transmettre, murmurant ses paroles venimeuses au creux de l'oreille promettant milles et unes souffrance. Tout ça comprenait chacun des coups que j'avais du lui porter. Tout ça comprenait les uniques coups que j'avais porté de mon plein grès contre cette jeune apprentie. Tout ça comprenait le fait que je l'ai bousculé aujourd'hui. Comprenait également le fait que ma seule présence, que le seul fait que je sois en vie terrorise le félin.

Il pouvait me frapper s'il le voulait. Si cela lui faisait du bien...

Spoiler:

N'est-il pas beauuuu? Merci Trash

Pelote:

Déchet:

Entre deux déglutitions étranglés le pauvre Pelote peina à prendre la parole.

" Avais-je le choix... "

Lui aussi semblait secoué par les vielles racines d'un temps perdu enfouis en lui. Enfoui en eux, germant du même arbre, graine née de la lune rouge don l'héritage sanglant n'avait pas tout à fait quitté la forêt, le quitterait-il au moins un jour ?

" Si je ... "

Les deux matous noirs avaient en commun bien plus qu'ils ne l'auraient jamais imaginés, peu-être dans un monde différent ou Feulement aurait été plus ouvert auraient-ils put partager le malheur qui pesait sur leurs deux épaules, reste d'un cours croisement de chemin qui avait pourtant suffit à les marquer à vie.

" Si je t'avais vraiment cogné j'aurais été exempté de ma situation de souffre-douleur et tu ne serais pas là à me faire du mal. "

C'est vrai qu'il ne se défendait pas, c'est vrai qu'il se laissait mollement malmener comme un pantin de bois que l'on trimbale d'un bout à l'autre de la scène. Soumis et acceptant ce que Feulement le lui réservait, que cela soit la douleur ou la mort pure et dure. C'était peu-être bien ce manque de fougue et de témérité qui lui sauverait la vie ce soir-là. Oh s'ils s'étaient battus le lieutenant n'aurait pas hésité à égorger ce souvenir sous les yeux observateurs des arbres du verger. Il n'y aurait pris aucun plaisir mais peu-être la mort de Déchet l'aurait soulagé comme celle de Feuille de houx l'avait fait. Jamais il n'oublierait son ultime regard. Cela avait été presque un jouissif de le tuer mais là rien de sadique, une simple vengeance comblée par le sang.

" Or si tu te souv- ... Non... ne te rappelle pas. Ces souvenirs sont le mal. Ce n'est pas grave. "

Feulement, d'habitude si stoïque, du en venir à fermer les yeux à son tour, secouant la tête pour chasser les mémoires des jours anciens qui avaient hélas forgés le chat qu'il été devenu. Ses cauchemars se chargeaient bien assez de lui susurrer les contes de son passé don les cris et les pleures lui faisaient bourdonner les oreilles. Il était passé au-dessus de cela, pouvait même s'exprimer sur la lune rouge qui l'avait condamnée sans y rencontrer trop de problèmes mais le rappel été trop vif, le visage de Déchet en dessous de lui trop réel. L'odeur et la sensation poisseuse du sang trop étouffantes. Il finit enfin par s'ôter du corps désarticulé de l'ancien Lunar pod gravement amochés dans un sifflement enfermant une myriade d'émotions négatives don il ne pouvait lui-même faire la liste. Libérant la chaire du domestique de ses griffes empourprés par leur "bataille" qui n'avait vraiment d'un combat que l'apparence. C'était là un règlement de compte malgré eux, une punition pour le chat de maison au collier maintenant arraché. Dieu bénisse sont accès au vétérinaire ou sinon il aurait été fort probable qu'il n'ait pas survécu à l'attaque du lieutenant de l'ombre.

" Je suis désolé pour tout ça. "

Le mâle charcoal ne répondit pas, s'enfermant dans son mutisme habituel tandis qu'il s'attela, d'un réflexe incontrôlé trahissant son agitation, a activement lécher et remettre en place sa fourrure. Tique nerveux très commun aux félins. Il ne savait simplement pas quoi dire, ni quoi faire, perdu face à la situation. Face à lui-même, face à eux-même, face à la lune.