J'ai noté "flashback" car ce rp a lieu juste au moment de l'inondation La tempête n'a pas encore éclaté, il n'y a que les signes annonciateurs pour l'instant
Quelque chose ne va pas. Le ciel, l'air ; ils vrombissent.
*
« - Nuage de Chacal ? »
Elle l'appelle doucement, tout en passant sa tête dans l'entrée de la tanière des apprentis. Derrière elle, les derniers rayons du soleil gorgent son élégant pelage de milles reflets et le vent, doucement, vient remuer dans ses moustaches. Le clair regard de Luciole se plante dans celui de son apprenti tandis qu'elle poursuit :
« - Rejoins-moi à l'entrée du camp après avoir mangé, je t'attends. »
En trottant, la guerrière se retire et vient s'asseoir sagement, comme annoncé, à l'entrée du camp de l'Ombre. Nuage de Chacal doit être encore un peu fatigué après leur intense mâtinée passée à chasser avec la petite Corbeau et son mentor, d'autant plus qu'il a dû être occupé par la suite, quand la femelle est repartie chasser en solitaire... Mais elle tient à reprendre certaines stratégies de mêlées avec lui, ils n'ont pas eu le temps de le faire la veille. Luciole des Bois s'étire longuement, dénoue ses muscles, se permet même quelques exercices de souplesse pour s'échauffer, afin d'être parfaitement au point lorsque le petit arrivera.
C'est alors qu'elle tire sur ses griffes que Chacal débarque d'un pas rapide ; d'un mouvement de l'oreille elle lui signifie qu'elle l'a bien entendu arriver. Son petit manège terminé, Luciole se redresse et annonce leur départ d'un geste de la queue, son discret sourire sur les lèvres. Elle se glisse lestement dans le tunnel menant à l'extérieur, son apprenti sur les talons et, dès lors qu'elle arrive de l'autre côté, dès lors qu'elle fend son territoire à grandes enjambées, dès lors qu'elle respire la plus petite particule d'air frétillant sous son nez elle se dit :
Il y a quelque chose de particulier, en cette fin de journée. Le soleil a disparu, le vent est tellement lourd soudainement. Ce ciel si sombre n'a plus le moindre éclat, et la guerrière fronce les sourcils.
*
Cela fait un moment maintenant, que Luciole entraîne Nuage de Chacal, en plein cœur du marécage, entre les roseaux. Longuement, elle lui a expliqué les techniques qu'il devrait utiliser lorsqu'il se retrouve en plein cœur d'une cohue, dans laquelle il n'est plus possible de voir, ni d'entendre, ni de sentir, tant la cacophonie sensorielle devient puissante. Apprendre à calmer son cœur, en passant par la respiration, mais surtout, avant toute chose : chercher le sol, le plus possible, constamment, comme une idée fixée au fin fond du crâne que l'on ne pourrait jamais retirer. Car si le centre de gravité se surélève de trop alors tout de suite, on est emporté par la marée, la moindre culbute nous envoie au loin – surtout si c'est la Rivière, en face. Avec le sol comme meilleur allié, les pattes restent ancrées et elles ne se dérobent plus, les mouvements superficiels – un encombrant détail – cessent leur interminable tremblement.
Avec un peu de lavande, Luciole a obstrué l'odorat du petit. Elle lui a ordonné de fermer les yeux. Il ne peut pas s'empêcher d'entendre, mais dans ces conditions il se rapproche déjà un peu plus de cette sensation d'être coupé du monde, lorsque tout va si vite et qu'on perd le fil.
« - Montre moi tes mouvements, Nuage de Chacal. Essaie de t'imaginer en plein cœur de cette cohue. Bouge tes pattes, montre-moi où tu mettrais, comment tu te tiendrais, instinctivement. »
Elle voudrait se concentrer sur lui. Mais il y a quelque chose, définitivement, au fond de l'air. Le vent souffle, de plus en plus fort, ébouriffe son pelage et celui de Chacal qui, devant elle, entame scrupuleusement la danse. Les yeux de Luciole se plissent. Il fait tellement chaud, il fait tellement froid ; les deux sensations se mélangent et lui hérissent le dos. Ses pupilles suivent Nuage de Chacal, elles ne le quittent pas un instant. Mais ses questions, ses mots, si il en prononce ; tous sont ignorés. Car la guerrière est ailleurs. C'est là qu'elle remarque enfin :
Le silence.
Absolument rien ne bouge, le monde s'est tu. Les animaux s'en vont et plus personne n'ose prononcer quoi que ce soit. Même le croassement des grenouilles a disparu. Et le murmure du vent entre les roseaux se fait tellement discret.
Ses yeux se détournent de son apprenti et elle se redresse sèchement. Son cou tendu, elle hume l'air, capte toutes les odeurs. C'est la pluie, n'est-ce pas ? Elle arrive. Luciole des Bois se jette presque sur ses pattes.
« - Nuage de Chacal, l'entraînement s'arrête là. On rentre. »
Elle dit cela avec légèreté, de sa voix d'enfant. Pourtant, c'était extrêmement ferme. Luciole ne sait pas exactement ce qu'il se passe, mais elle sait qu'ils doivent rentrer. Et ils doivent le faire tout de suite.
Ombre chaton, 15 lunes Lune 39 O - Territoires piquants
[INONDATION - flashback] Vrombissements
Feat : Luciole des Bois
Le jeune chat poursuivait sa formation avec sa mentor, Luciole des Bois. Au début, il l'avait trouvé beaucoup trop gentille et mielleuse et s'était dit que sa formation allait être longue si chaque fois que la chatte lui adressait la parole, des envies de vomir lui retournaient l'estomac... Mais finalement, malgré son coté trop gentille qui l’agaçait, il avait appris à apprécié la chatte. Il ne s'aviserait jamais de le lui montrer, ou le lui dire, mais il avait développer du respect pour elle. Il lui avait fait des crasses on ne peut plus imaginable, pourtant, jamais elle n'étais aller se plaindre auprès de ses chefs pour changer d'apprentis, alors que bien d'autres l'auraient fait... De plus, jamais non plus elle avait tenté de le changer lui. Elle semblait l'accepter comme il était, même si ça ne devait pas être facile pour elle, elle n'en montrait rien malgré tout et s'appliquait à le former.
Il s'était dit plusieurs fois qu'il devrait se montrer plus gentil avec elle, mais il n'y arrivait pas. Chacal était un cancre et la gentillesse ne faisait pas vraiment parti de ses qualités, comme la compassion ou la tendresse. Déjà, il reconnaissait qu'elle était une très bonne guerrière et une bonne mentor, il ne fallait pas trop en demander au petit cancre, tout de même. Sa formation avançait gentiment et il s'appliquait à apprendre minutieusement ce qu'elle lui apprenait, sans pour autant se montrer trop assidus. Il avait une réputation de râleur et cancre à entretenir !
Son corps avait changé également au fil des lunes. Il n'avait plus le corps d'un chaton empoté comme le 1er jour de formation avec Luciole, lorsqu'il avait peiné à avancer dans les marécages boueux. Ses pattes s'était allongées et affinées, il avait beaucoup grandit. Mais par contre, ses muscles tardaient à venir, et pour le moment, il avait une tronche horrible se disait-il. Des longues pattes très fines, un corps rachitique, à tel pour que certains devaient se demander s'il mangeait vraiment à sa faim... Son physique actuel, il le détestait. Et lorsqu'il n'était pas en formation avec Luciole, il s'était découvert une passion pour attaquer les autres sur leur physique avant qu'eux-même ne le fasse avec le sien. Il lui fallait encore se trouver quelques compères de moquerie, histoire d'avoir sa petite bande dont il serait le chef...
La journée touchait à sa fin. Le jeune chat se trouvait dans la tanière des apprentis et s’apprêtait à commencer son repas après une dure journée intense de chasse avec Nuage de Corbeau et son mentor. Il ne savait pas encore très bien quoi penser de la femelle qui était une apprentie toute fraîche... Il faudrait qu'il approfondisse le sujet... Il fut tiré de ses pensées par la douce voix de sa mentor qui l'appelait. De mauvaise grâce, il tourna la tête, les oreilles en arrière, agacé qu'elle ne le laisse pas en paix... Elle lui ordonna de la rejoindre à l'entrée du camp après son repas. Il ne répondit rien et sa queue s'agita avec agacement. Néanmoins, il ferait ce qu'elle demandait...
Son repas terminé, il avait pris son temps le bougre, il sorti de la tanière des apprentis et se dirigea vers l'entrée du camp, où l'attendait Luciole, comme elle l'avait dit. Lorsqu'il fut arrivé près d'elle, elle était en train de s'étira, ce qu'elle termina de faire, lui mentionnant tout de même qu'elle savait qu'il était arrivé par un mouvement d'oreille dans sa direction. Il avait dû rapidement apprendre le langage corporelle de la chatte qui utilisait souvent que des brefs et subtils mouvements pour lui dire ou indiquer quelque chose qui ne nécessitait pas de parler. La chatte ayant terminé de s'étirer, d'un mouvement de queue, elle l'invita à la suivre, ce qu'il fit, gardant tout de même sa moue boudeuse collée sur sa tronche.
Depuis quelques temps, la chasse l'entraînait au combat, dans des terrains divers et variés, pour qu'il apprenne à se battre quelque que soit les conditions du sol, et de son environnement. Il maîtrisait plutôt bien les techniques basiques, alors à présent, elle lui obstruait l'odorat avec de la lavande, et exigeait de lui qu'il ferma les yeux pendant la séance. Ne lui restait donc que l'ouïe et le toucher pour se repéré durant ses enchaînement de mouvements complexe. La seule consigne de la chatte, retrouver le sol le plus rapidement possible. Elle lui donne des consignes et il doit tendre l'oreille pour comprendre ce qu'elle dit. Le vent souffle fort et siffle entre les arbres forçant le passage trop étroit. Néanmoins, il commence la dance qu'elle lui apprend depuis plusieurs semaines, les yeux fermer et l'odorat indisponible.
Soudain, le vent se calme, et le silence les entourent. Il a apprit à écouter ce qui l'entour, tout le temps. Et ce silence n'est pas habituel... Il ne sait pas ce qu'il se passe, mais la chatte stop l'entraînement et lance le retour à la maison d'une voix enfantine mais ferme. Il rouvrit les yeux et regardant la chatte, il hocha la tête en haussant les épaules pour dire qu'il avait compris ce qu'elle disait, et que ça lui était bien égal que l'entraînement s’arrêta si vite. La chatte se met en route et il la suit.
Le vent se fait à nouveau très fort, les arbres craquent et bougent sous la force des courants d'air. Mais le jeune chat n'a pas peur, ce n'est pas la 1ère fois que le vent souffle si fort. Et Luciole l'a bien entrainé à se battre sur tous les terrains et quelque ce soit la météo. Une idée vicieuse lui vint en tête, et s'il faussait compagnie à la chatte. Après tout, une escapade en solo, c'était toujours intéressant... Profitant des bruits environnant, il se glissa sous un buisson à coté de lui et dès qu'il fut hors de vie, il se mit à trottiner, laissant ses pattes le guider. Il savait que Luciole ne mettrait pas longtemps à s’apercevoir de sa fugue, ni à le retrouver. Mais il aimait bien embêter un peu la chatte...
Le vent continuait de souffler fort, et il semblait au jeune chat qu'il soufflait même de plus en plus fort. Les craquements des arbres se faisait plus fort, et plus souvent. Aucun animal n'était visible, pas le moindre oiseau chantant, il ne croisa pas le moindre rongeur non plus... Soudain, un éclair illumina tout le ciel qui était devenu si sombre sans qu'il s'en aperçoive vraiment. Puis tout de suite après, le tonnerre gronda, si fort qu'il dut coucher ses oreilles, et si longtemps qu'il se demanda un instant si le sol n'allait pas s'effondrer sous ses pattes. Car oui, la terre vibrait comme si elle répondait au tonnerre qui dura si longtemps. Jamais il n'avait entendu le ciel vrombir de cette manière... Là, il commençait à douter que sa petite escapade soit une réelle bonne idée. Mais il ne rebroussa pas pour autant chemin en direction de sa mentor qui devait s'être probablement rendu compte de sa disparition à présent...
Encore un éclair, puis le tonnerre, aussi long et fort que la 1ère fois. Puis la pluie, si on pouvait appeler ça de la pluie. Avant même d'avoir le temps de dire "pluie", il fut déjà trempé comme s'il avait sauté dans la rivière pour prendre un bain. Rapidement, la terre sèche devint mouillée et même boueuse sous ses pattes. Comme si la terre ne pouvait pas absorbé l'eau qui tombait du ciel. Le ciel semblait être en colère, et la forêt aussi, et le sol, lui, ne disait rien, tant il était boueux maintenant... Le jeune chat Commençait réellement à se dire que tout cela n'était pas normal... Il se dit que cette fois, il a peut-être fait une grosse bêtise en faussant compagnie à la chatte rose... Il fait demi-tour, essayant d'ouvrir le plus possible ses sens, mais c'est difficile, tout ce qu'il sent, entend et voit, c'est la forêt en colère...
Alors qu'il marche, juste à coté de lui, un arbre craque, plus fort que tout ce qu'il a jamais entendu, et il regarde son tronc se déchiré et l'arbre qui tombe ensuite droit sur lui. D'abord pris de panique, il ne peut plus bouger, puis son instinct de survie prend enfin le dessus sur sa peur, et il bondit de coté au dernier moment. L'arbre s'effondre, à l'endroit exact où il se trouvait, moins d'une seconde plus tôt dans un fracas absolument énorme. Le sol vibre sous ses pattes pendant un temps qu'il lui semble être une éternité. Cette fois, le jeune chat est terrorisé ! Au loin, il entend et sent dans ses pattes, un autre arbre vient de s'effondrer... Luciole lui a bien appris à ressentir les choses avec ses pattes, mais là, il serait bien incapable de sentir autre chose que la forêt qui s'effondre sous la colère du ciel, et lui, qui se retrouve là au milieu... Alors il fait la seule chose qui lui semble censée à ce moment-là... Il pleure et appelle sa mentor, priant pour qu'elle le retrouve, vite !
—"LUCIOLE !!!!!"
Il crie le nom de sa mentor, comme une complainte, se disant que sa lui permettra de le retrouver plus vite. Près de lui, un autre arbre s'effondre, il le sent dans ses pattes et parvient à se mettre à l'abri. C'est la 1ère fois que le jeune chat à réellement peur durant sa courte vie. Il a envie de se cacher entre les racines de l'arbre le plus gros qu'il trouverait, mais sa raison parvient tout de même à lui insufflé que ce n'est pas une bonne idée... Alors il reste là à découvert, au milieu des arbres, à tourner sur lui-même en appelant de toute ses capacités vocales et pulmonaires sa mentor sans s'arrêter, tout en surveillant les alentours pour la voir apparaitre et pour ne pas se faire surprendre par un autre arbre qui tomberait. Le jeune chat tremble, aussi bien de froid que de peur... Il est bien loin le jeune chat moqueur et fier...
D'un pas rapide, Nuage de Chacal sur les talons, Luciole des Bois se presse en direction de leur camp. Ses mâchoires sont serrées, son regard sévère et inquiet ne fléchit pas un instant tandis qu'elle fend les grands pins et traverse sans encombres les marais. Elle sait qu'elle a eu raison de mettre fin à l'entraînement. Son instinct lui hurle qu'ils doivent partir, se mettre à l'abri au plus vite. Et lorsque la première goutte d'eau tombe sur son nez, elle sait que les éléments sont en marche, qu'ils viendront confirmer ses inquiétudes. Alors qu'ils sont presque arrivés au camp, la guerrière peut sentir le vent envelopper sa silhouette, gonfler son pelage parcouru de courants électriques vifs et effrayants. Ses vibrisses sensibles ne lui sont plus d'aucune aide alors que la tempête se met à stagner par delà les cimes, menaçante, plongeant cette fin de journée dans une obscurité opaque et instable. Le vrombissement qu'elle entendait devient un râle, lointain et grave ; elle dresse ses oreilles. Puis soudain, c'est l'éclatement et les vrombissements ne sont plus qu'un cri perçant. Luciole des Bois s’aplatit sur le sol en même temps que la pluie s'abat violemment sur son corps. C'est comme si toute l'eau contenue dans les marais c'était soudain soulevée pour se laisser retomber, en plein sur elle. En une seconde à peine, l'ensemble de sa robe est trempée et tachée de boue. Elle couche ses oreilles, se protégeant du vent qui manque de l'emporter avec lui, et se tourne vers son apprenti, criant presque pour couvrir le bruit.
« - Ne t'inquiète pas, nous all- ... »
Les yeux de la femelle s'écarquillent d'horreur. Car derrière elle, il n'y a personne. D'un coup sec, presque un rebond, elle se dresse sans plus faire attention ni au vent, ni à la pluie, ni au tonnerre sauvage qui gronde. Ses yeux grands ouverts, autant que sa gueule qui tente, du mieux qu'elle le peut, de capter des odeurs, elle cherche, furète, partout autours d'elle. Mais nul pelage brun, terré dans les environs.
« - Imbécile, jure-t-elle, l’œil rageur et angoissé. »
Celui-là, il a mal choisit son moment pour faire sa crise. Bien qu'elle sente sa colère, alimentée par sa peur, grandir en elle, Luciole garde la tête froide. Sans perdre une seconde de plus, oubliant même que le monde menace de l'engloutir à tout instant, la guerrière rebrousse chemin. Son visage n'affiche plus qu'une concentration extrême. Tous ses sens, aussi perturbés et inutiles soient-ils, sont fermement dirigés vers un seul objectif : retrouver Nuage de Chacal. À pleins poumons, Luciole des Bois appelle son apprenti, espérant être en mesure de capter sa réponse, si il l'entend. Elle cherche la moindre trace de pas qui n'aurait pas été emporté par la boue et la pluie, se prenant en pleine face branches et autres obstacles inconnus. Un arbre devant elle s'écroule sous la pression de la tempête, éclaboussant la femelle qui l'esquive sans même y penser. Dangereusement, le niveau de l'eau sur le sol commence à monter, gorgeant tellement la terre, déjà humide, du territoire du Clan de l'Ombre. À tel point que Luciole se retrouve à patauger dans la terre jusqu'au ventre, s'embourbant lentement. Son cœur bat la chamade alors qu'elle sent la morsure de la terreur la prendre à la gorge, mais, comme une éclaircie, elle entend un cri. Elle s'arrête une seconde, tourne la tête en direction de ce son passant difficilement la barrière de l'eau.
« - LUCIOLE !!!!! »
La guerrière s'élance à pleine vitesse, comme portée par une énergie nouvelle. Une large branche tombe droit sur elle, lui fouette si violemment le visage qu'elle l'entaille, mais elle l'ignore ; imperturbable. Elle ne perçoit même pas le goût métallique du sang qui vient se mouiller à la commissure de ses lèvres.
Enfin, elle le voit. Nuage de Chacal est juste là, tournant sur lui-même, hurlant et pleurant, terrorisé par cette nature qui s'effondre. Si petit, vulnérable. Et elle ne ressent rien, pas même du soulagement. Sans doute car elle n'a pas le temps. Luciole des Bois le voit très bien, cet arbre là, qui tombe, comme au ralentit, droit sur lui. Mais elle le jure, devant le Clan des Étoiles lui-même, que personne se trouvant sous sa responsabilité ne mourra sans qu'elle n'ait tout essayé. Et elle prit ses ancêtres de lui donner toute la force nécessaire pour honorer cet engagement.
La femelle s'élance, se tord tel un fouet, l'arbre claque sur le sol en un bruit sourd. Et elle roule, elle roule et roule encore, avant de s'arrêter, les flancs en feu. Lorsqu'elle ouvre ses larges pattes, lentement, le petit est là, tout contre son poitrail.
Le jeune chat continue de tourner sur lui-même, en proie à la peur au milieu de cette nature déchaînée. Il n'a jamais connu ça au court de sa vie encore si courte. Il a peur comme jamais ça ne lui est arrivé. Il se sent si désemparé, si vulnérable, comme lorsqu'il n'était qu'un tout petit chaton tout juste bon à tenir sur ses petites pattes trop fragiles et frêles pour le porter. Il pleurait, sa vision était brouillée par les larmes, il ne voyait plus vraiment clair, un bourdonnement incessant lui coupait presque l'ouïe, comme s'il devenait sourd ou partiellement. Il continuait d'appeler sa mentor, en une complainte douloureuse, comme s'il se disait qu'à travers le brouhaha de la tempête, elle ne pourrait pas l'entendre et qu'elle ne viendrait donc pas à son secours...
Un énorme craquement retenti et malgré son ouïe diminuée, il l'entendit, c'était l'arbre immense entre les racines duquel il avait pensé s'abriter. L'arbre bougeait, il allait tombé. Mais le petit était trop tétanisé pour bouger, il savait qu'il devait bouger, il savait que s'il ne bougeait pas, sa vie se terminerait ici-même, mais il en était incapable, ses membres refusaient de bouger, comme si son corps ne répondait plus. Il voyait l'arbre énorme lui arriver dessus, mais il ne bougeait toujours pas. Soudain, il se sentit percuter et il se dit que ça y était, cette fois, il était mort, impossible de survivre à un arbre pareil lui tombant dessus. Mais le monde tournait autour de lui, comment se faisait-il qu'il pouvait encore ressentir des choses, il avait toujours cru que la mort coupait tout, que c'était le noir total, que plus rien n'existait après ça...
Il sentit du mouvement sur lui, ses sens étaient atrophiés par la peur, encore. La forêt et le ciel continuaient de gronder, en colère. Il ne comprenait pas, il ne voyait rien, tout était noir... Mais il sentait quelque chose de chaud autour de lui, de rassurant, comme si tout allait aller bien... Il ne comprenait pas ce qui lui arrivait, mais il y avait une seule chose dont il était absolument certain... Il ne voulait pas mourir si jeune. Il voulait vivre, et il se battrait pour ça, jusqu'au dernier espoir ! Il ouvrit les yeux, qui ne virent absolument rien, comme s'il était enfermé dans le noir. Il se mit à se débattre comme un diable. Mais ce qu'il tapait était mou, il n'y comprenait vraiment rien, mais il refusait de mourir ! Enfin, il se libéra de l'emprise et roula au sol. Il se releva rapidement et regarda autour de lui... En réalité, il avait paniqué pour rien, c'était Luciole qui le retenait contre son corps... Mais ses sens étaient amoindri et son odeur ne l'avait pas frappée... Il regarda autour de lui, et vit l'arbre immense effondré près de leur deux corps. Le choc qu'il avait senti et cru à sa mort, ce devait être Luciole qui l'avait percuté pour lui sauver la vie. Elle l'avait retrouvé, et juste à temps... Il revint vers la chatte et frotta sa tête contre elle. Elle devait se lever, la tempête faisait toujours rage autour d'eux, ils ne devaient pas rester là...
—"Luciole, Luciole, debout ! J'ai peur, il faut pas rester ici, debout, je t'en prie, relèves-toi !"
Il la secoua de la patte et poussait sa tête avec la sienne. Il ne pouvait pas la porter, et il ne voulait pas l'abandonné là non plus. Elle venait de lui sauver la vie, il ne pouvait pas croire qu'elle ne s'en sortirait pas ! Il continuait de la secouer, il refusait de l'abandonné. Ils étaient complètement trempé, et le jeune apprenti avait peur. Mais il savait de toutes façons que sans Luciole, il n'aurait aucune chance.
Le souffle coupé par le choc, Luciole des Bois peine à se maintenir à la surface. Elle crache, libérant sa gorge obstruée par l'eau et, au vu de la couleur, probablement un peu de boue. La vision se fait faible, l'effort qu'elle vient de fournir était tel qu'il lui a coûté une énergie considérable. Mais, contre elle, bien qu'elle ne puisse pas le voir, elle sent le corps de son apprenti dont les battements de cœur se mêlent aux siens. Il est vivant. Elle ferme les yeux, luttant pour reprendre une respiration normale. Entre ses pattes Nuage de Chacal se débat comme un diable. Luciole tente de son mieux de resserrer la prise, pour qu'il reste cacher contre son pelage mais rien n'y fait ; le jeune mâle se libère d'un seul coup, et les pattes de la guerrière retombent mollement sur le sol. La femelle ne s'y attendait pas, mais son apprenti revient à la charge, contre toute attente. Elle le sent qui frotte sa tête dans son pelage sale, la pousse.
« - Luciole, Luciole, debout ! J'ai peur, il faut pas rester ici, debout, je t'en prie, relèves-toi ! »
« Tais-toi... tais-toi ! » a-t-elle envie de râler. Une grimace déforme son visage, ses yeux se rouvrent lentement et un grognement lui échappe. Elle sait très bien ce qu'elle a à faire alors qu'il ne s'inquiète pas. Ce n'est pas comme si elle avait prévu d'abandonner maintenant. Luciole des Bois prend une grande inspiration tout en posant sa patte sur le sol, forçant ses muscles endoloris à la relever. Sa silhouette grande courbée et dégoulinante de boue, fouettée par l'eau et le vent qui n'en démordent pas, dépasse pleinement le jeune Chacal terrifié entre ses pattes. Peut-être bien qu'elle titube, qu'elle a mal, aux poumons et dans tous son corps, mais pourtant Luciole attrape le cou de Nuage de Chacal avec énergie. Avec une telle force qu'elle manque presque de lui faire mal. La voilà qui repart de plus belle, comme un colosse que rien ne saurait arrêter. Contre elle, le corps de l'apprenti est presque encombrant mais elle ne peut faire autrement. Elle doit le ramener au camp, c'est son devoir de le mettre hors de danger. La guerrière n'arrive pas à réfléchir. Tant de questions se bousculent dans sa tête : pourquoi ne l'a-t-il pas suivis quand elle lui a ordonné ? Pourquoi le ciel est-il tellement en colère ? Que se passe-t-il, au camp ? Est-ce vraiment le meilleur endroit pour se mettre en sécurité ? Est-ce que tout le monde va bien là-bas ? Y a -t-il des morts, des blessés... ? Elle n'en sait rien, c'est impossible de répondre à tout cela. Tout ce qu'elle sait, c'est que son apprenti qu'elle serre entre ses mâchoires est bien vivant, elle aussi et qu'elle doit à tout prix le ramener dans un endroit sur.
Le jeune chat continue de tenter de "réveiller" sa mentor, priant pour qu'elle le fasse vite. Elle n'est pas morte, il la voit et l'entend respirer, mais peut-être sonnée par le choc qui lui a sauver la vie. Il faut dire que Chacal n'est plus si petit, bien au contraire, le jeune chat a bien grandit et même s'il lui manque un peu de muscle, il est bien le fils d'Orage.
Enfin, Luciole bouge et patte après patte, elle se redresse, se remet debout. L'apprenti est soulagé, mais avant qu'il n'ait pu faire quoi que ce soit, la chatte l'attrape par la peau du cou et se met à courir. Le jeune chat, surpris, n'est, au début, pas capable de bouger, comme s'il ne réalisait pas ce qui était en train de se passer. Mais petit à petit, il reprend corps avec le monde réel et ce qu'il se passe. Luciole le porte, comme un chaton et court de toutes la force de ses pattes... Mais elle est folle, il est bien trop lourds pour elle, et bien trop grand, donc encombrant pour se déplacer ainsi. Et il sent la chatte qui peine et qui n'est largement pas à sa vitesse de course normale.
D'un mouvement de l'arrière train, il se dégage de la prise de la chatte, elle l'a bien entraînée, sans lui faire de mal. Puis, il la regarde et déterminé, il lance :
—"Promis, je te suivrais cette fois Luciole. Mais on ira pas assez vite si tu dois me porter !"
Sans attendre qu'elle ajoute quelque chose, il se met à courir, dans la direction qu'avait prise sa mentor avant qu'il ne se libère de son emprise. Il était prêt à la suivre, et cette fois, il ne lui ferait pas faux plan, il avait bien compris que le danger était réel et qu'il fallait quitter cette forêt en colère avant qu'elle ne les tues. Il ralentit légèrement sa course histoire de laisser la chatte passer devant lui, puis accéléra pour la suivre. Elle l'avait entraîné, elle connaissait son rythme de course d'endurance, ainsi que sa vitesse de course de pointe.
Un grondement sourd fait trembler le ciel, puis une lumière vive éclair tout l'horizon noir qui devient blanc l'espace d'un instant. Puis la foudre arrive, elle descend, Chacal voit l'éclair de Lumière qui fonce droit vers eux, au travers des feuillages des arbres. Elle tombe sur un arbre immense tout prêt d'eux. L'arbre émet un craquement sinistre, puis un autre et Chacal, continuant de courir, voit une énorme branche se casser et commencer à tomber droit devant eux. Son regard descend, anticipant le point de chute de la branche énorme et son regard tombe sur la croupe de sa mentor en pleine course. La peur est toujours là, mais elle n'a plus le dessus sur lui, il pousse sur ses pattes, forçant encore l'allure, pas le temps de prévenir la chatte, il doit agir, et c'est comme si des ailes lui avaient pousser depuis toute à l'heure. Il amorce un détour par la droite et soudain, il s'élance et percute la chatte de plein fouet, les envoyant rouler à quelques mettre de là. La branche enflammée s'écrase d'un bruit sourds et sinistre là ou se trouvait Luciole quelques instants avant.
Elle peine. De plus en plus, Luciole le sent dans ses pattes qui se raidissent à mesure qu'elle essaie de couvrir la distance qui les sépare du camp. Son corps devient lourd, celui de son apprenti une véritable pierre et leur objectif lui semble terriblement lointain alors que le ciel sombre toujours dans sa lente agonie. Luciole des Bois se dit qu'elle n'y arrivera pas. Pas cette fois. Pourquoi ? Pourquoi maintenant, pourquoi n'est-elle pas capable de protéger le petit dont elle a prit soin pendant toutes ces lunes ? Elle, arrogante et puissante guerrière de l'Ombre ; une incapable, voilà la vérité. Mais malgré cela, la femelle continue d'avancer. La boue des marécages gluants collée à son pelage l'embourbe et la ralentit plus encore mais pas après pas, elle avance sans mot dire, sans se plaindre un instant ni même laisser transparaître ses pensées.
Soudain, Nuage de Chacal remue et, d'un coup d'arrière train, il se dégage de sa prise. Luciole fixe ses yeux, décontenancée, avant de froncer les sourcils. Elle sent la colère monter et :
« - Chacal, qu'elle grogne, ce n'est- - Promis, la coupe-t-il, je te suivrais cette fois Luciole. Mais on n'ira pas assez vite si tu dois me porter ! »
Luciole des Bois allait protester, avant de se résigner. Elle incline la tête en signe d'approbation ; il a raison. Nuage de Chacal file et elle part à sa suite avant qu'il ne la laisse reprendre les devants. Libérer du poids de son apprenti, Luciole des Bois se sent plus légère et plus rapide. Hélas, elle comprend assez vite qu'elle ne parvient pas à être aussi rapide qu'à son habitude. Le terrain accidenté les empêche d'avancer, leurs pelages collants sont un fardeau et la fatigue et la peur brouillent leurs esprits. Prenant le duo par surprise, un éclair déchire le ciel et s'écrase sur un arbre non loin. Les mâchoires de la femelle se serrent ; ils n'ont pas le choix, ils doivent avancer, alors elle accélère tant qu'elle le peut, comptant sur l'adrénaline pour les pousser dans leurs derniers retranchements. Tout à coup, elle distingue à sa périphérie une silhouette qui s'approche et Luciole n'a pas le temps de réagir qu'elle est touchée et envoyée à terre pour rouler sur quelques longueurs de queue. Ahurie, elle jette ses yeux pleins d'incompréhension sur Nuage de Chacal, avant de finalement comprendre son geste. Une branche, enflammée par l'éclair, tombe lourdement sur le sol. Le feu s'éteint sans tarder sous l'incessant crachat de la pluie, la branche de l'arbre n'est plus qu'une masse carbonisée et sans vie. Elle n'a pas le temps de le remercier. Presque instantanément, Luciole des Bois se remet sur ses pattes et pousse Chacal à faire de même en le secouant du bout du museau. De plus belle, l'apprenti et sa mentor repartent au pas de course et filent à travers les marécages souillés et les pins abîmés.
Malgré tous leurs efforts, la guerrière comprend qu'ils n'y parviendront pas. Que c'est trop dangereux. Tous les éléments sont contre eux, même leurs corps, et leur territoire qu'ils connaissent pourtant par cœur les trompent en les forçant à prendre des chemins de plus en plus alambiqués. Alors Luciole des Bois prend une décision. Elle ralentit pour se retrouver à la même hauteur que son apprenti à qui elle lance :
« - Le camp n'est plus une option. Suis-moi. »
Son ton était ferme. C'est un ordre et elle n'écoutera pas la moindre protestation. De la queue, la guerrière indique les directions à son apprenti afin d'être certaine qu'il ne se perde pas. Elle sait exactement où elle va, et elle sait que de la où ils sont cette retraite sera plus accessible que le camp qui est encore bien trop loin. Quelques minutes dans cet enfer lui paraissent incroyablement longues, pourtant c'est bien là tout ce qu'il faut à Luciole pour emmener son apprenti jusqu'à la danse zone forestière entourant le cèdre calciné. Mais ce n'est pas vers lui qu'elle se dirige, la femelle prend un peu plus au nord et s'arrête, enfin, devant un vieux et large terrier de blaireau qu'elle sait inhabité depuis des lustres. D'un geste de la queue, elle ordonne à Chacal de patienter sagement, tandis qu'elle s'empresse de l'inspecter. De la boue glissante s'est infiltrée à l'intérieur, il est très humide, mais il n'y a personne ; autrement dit c'est parfait. Ils vont avoir froid, mais ce sera amplement suffisant pour attendre que la tempête s'éloigne définitivement. Luciole des Bois retourne auprès de Chacal pour lui annoncer :
« - Rien à signaler. Nous allons nous cacher ici. Dépêche-toi. »
Vivement, la femelle passe derrière lui pour le pousser à entrer au plus vite dans le terrier, jusqu'à ce qu'ils atteignent le large espace creusé, dans lequel le blaireau qui y vivait autrefois devait dormir. L'espace resserré ne leur permet pas de se mouvoir librement mais Luciole ne s'en formalise pas. Ses yeux vérifient constamment la sortie qu'elle surveille sans ciller, prête à réagir si quoi que ce soit s'approche. Lourdement elle inspire, expire tout son air par le nez, calmant doucement les battements de son cœur. Ici ils sont protégés de la pluie, du vent, et même du vacarme qui est atténué par la barrière de la terre. La femelle tourne la tête et plonge ses yeux vert dans ceux de son apprenti à ses côtés, lui demandant de sa voix douce :
« - Tout va bien ? As-tu mal quelque part ? »
Pourtant, son visage de glace ne se pare pas du moindre sourire.
Lorsqu'il s'était dégagé vigoureusement, la chatte avait voulu protester mais il l'avait coupée et elle avait hoché la tête, admettant silencieusement qu'il avait raison. Il n'était plus le chaton de 6 lunes qui avait commencé sa formation avec Luciole. Il avait pris en taille, en corpulence et en masse. Il n'était pas aussi grand que Luciole et fort que Luciole mais pas bien loin. Il approchait doucement mais sûrement de sa taille d'adulte et sa corpulence n'était pas encore terminée, il le savait, mais il s'entrainait beaucoup, même en dehors de entraînements de Luciole. Il voulait se débarasser au plus vite de ce corps dégingandé et trop svlete à son goût au plus vite. Pour ça, il lui fallait prendre de la masse musculaire et il n'y avait pas de remède miracle, l'entraînement, repousser ses limites et aller chaque fois un peu plus loin, il l'avait bien compris, grâce à Luciole qui ne l'avait jamais laissé abandonné (même s'il ne s'était jamais abaissé à demander grâce).
Luicole n'eut pas non plus le temps de le remercier de l'avoir sauvée de la branche enflammée qui s'écrasa à l'endroit même où elle se trouvait avant qu'il ne la percute de toutes ses forces. Elle hocha simplement la tête et le poussa du museau, ils devaient se remettre en route, ils n'avaient pas le temps de lambiner. L'effort était intense et les éléments étaient contre eux. Chacal avec mal à tous les muscles de ses pattes, sont corps était lourds de la fourrure mouillée et pleine de boue qui lui collait à la peau. La boue du sol limitait également leurs mouvements et leur demandait plus d'efforts. Mais comme il avait promis, il suivait Luciole, espérant qu'ils arriveraient sain et sauf au camp... Une idée le frappa soudain, et si le camp était dans le même état que la forêt... Et sa famille ? Il ignorait où était son père, sa mère et ses soeurs... Il sentit son coeur se serrer, car même s'il ne l'avouerait jamais, il aimait sa famille et elle était très importante à ses yeux. Mais il devait rester focaliser sur Luciole et leur survie pour le moment. Même si sa famille courrait un danger, c'était le cas de tout le clan probablement, il ne pouvait de toute façon rien faire à l'heure actuelle. Il devait sauver sa peau et pour le moment, Luciole était la seule à pouvoir l'y aider.
Elle ralentit pour se mettre à sa hauteur, lui garda la même cadence qui lui était déjà assez difficile à tenir sans devoir ralentir pour ensuite reprendre le rythme actuel... Elle lui dit que le camp n'était plus une option, trop loin et trop dangereux et lui ordonna donc de la suivre. Il avait rarement entendu la chatte rose avoir un ton aussi intransigeant depuis le début de sa formation. C'était un ordre et elle ne lui laissait pas le choix. De toute façon, même si cela n'avait pas été un ordre aussi dûr, il ne referait pas la même bétise que plus tôt, il avait compris la leçon. Il pouvait être très con, borné et tétu, mais il n'était ni suicidaire, ni fou.
Ses muscles le faisaient souffrir comme jamais, mais il s'appliquait à ne pas y penser et continuait de suivre la chatte rose à travers la nature enragée. Enfin, ils arrivèrent devant l'entrée d'un terrier qui semblait abandonné, elle lui ordonna de rester dehors et elle y entra, probablement pour vérifier qu'il était bel et bien vide. Elle ne mit pas longtemps à ressortir et le poussa du mueau pour qu'il y entre à son tour et elle le suivi ensuite. L'endroit était froid et humide, mais ils étaient à l'abri et il y avait juste assez de place pour les deux chats. Elle se coucha, face à la sortie et il fit de même, en face d'elle. Puis, après quelques minutes, elle lui demanda s'il allait bien et s'il n'avait rien de cassé. Sa voix était douce, comme à son habitude, mais son visage restait figé, froid et dur.
—"J'ai mal partout, mais c'est les muscles, trop d'efforts je pense, comme j'ai déjà eu après certains de tes entraînements, mais en pire... Et toi ?"
Il lui avait lancé un petit sourire lorsqu'il avait mentionné les courbatures qu'il avait déjà eu après certains entraînement, espérant adoucir un peu l'humeur de la chatte. Il se doutait bien qu'elle était inquiète, comme lui, pour leur vie, et pour celle du clan... Mais ils ne pouvait rien faire d'autre que d'attendre que la nature se calme, il l'avait bien compris... Il porta un regard sur leur deux corps couchés près l'un de l'autre sans pour autant qu'ils ne se touchent, ils étaient poisseaux et même dégoutants à souhait. Il sentait sa peau mouillée sous sa fourrure, la pluie avait été si forte et si intentse que sa fourrure n'était pas parvenue à garder son rôle isolant, il était complètement trempé. Il fallait qu'il se sèche sinon, il finirait par avoir froid... Alors il commença à se lêcher, néanmoins attentif aux bruits qui parvenaient du dehors. La colère de la nature étaient atténuée par la couche de terre sous laquelles ils se trouvaient, mais il entendait qu'elle ne se calmait pas...
« - J'ai mal partout, mais c'est les muscles, trop d'efforts je pense, comme j'ai déjà eu après certains de tes entraînements, mais en pire... qu'il lui répond, lui adressant au passage un petit sourire, chose si rare qu'elle mérite d'être notée et pourtant ; Luciole n'y réagit pas. Et toi ? »
Luciole des Bois cligne lentement des yeux, d'abord immobile, la respiration lente. Puis sa tête se tourne vers l'entrée, elle ne le regarde plus et se contente d'un simple « mmh » pour toute réponse. Dans la périphérie de son regard, elle constate que Nuage de Chacal entame de faire sa toilette, tentant probablement de se réchauffer. Elle aussi elle ressent la morsure du froid, il fait trembler ses pattes courbaturées. À mesure que l'adrénaline redescend, elle commence à éprouver l'impact qu'à eu cette course folle. Si elle n'est pas blessée – mise à part cette vilaine griffure au visage qui disparaîtra en quelques semaines – son corps est épuisé et ne manque pas de lui faire savoir. Difficilement, la guerrière déglutit. Bien qu'elle sache pertinemment qu'elle est impuissante, qu'elle ne peut rien face à la colère de la nature, elle ne peut s'empêcher de s'inquiéter. Son esprit se tourne entièrement vers ses proches ; son père, Mouron et Cormoran, Oreille Blanche, la petite Corbeau... Toutes ses pensées s'accrochent à eux, à leurs visages qui dansent devant ses yeux. Ses sourcils se froncent, imperceptiblement, et ses lèvres sont pincées. Intérieurement, Luciole adresse une prière à leurs ancêtres, leur demandant de les protéger, d'être cléments envers le Clan de l'Ombre, de l'aider à prendre les bonnes décisions face à cette catastrophe et de guider leurs guérisseuses qui doivent être débordées... Un nouveau soupir lui échappe et elle s'adresse à son apprenti :
« - Je te remercie Nuage de Chacal. »
Toujours aussi lentement, Luciole des Bois tourne à nouveau sa tête sale et encore trempée vers lui, le regardant droit dans les yeux.
« - Si tu n'avais pas réagit à temps, j'aurai été gravement blessée par cette branche. »
La femelle se laisse basculer quelque peu sur le flanc, étirant du mieux qu'elle le peut ses pattes arrières douloureuses. Elle hésite. Pourtant, elle sait que c'est son rôle de mentor, mais elle hésite... ce n'est pas qu'elle doute d'elle, c'est plutôt qu'elle n'est pas certaine d'avoir suffisamment d'énergie pour cette discussion. Malgré tout, Luciole des Bois se lance et lui expose, sobrement :
« - Néanmoins, je dois te dire quelque chose. Je te demande de m'assurer que tu ne recommenceras plus jamais ce que tu as fais aujourd'hui. Je te fais la promesse que si cela arrivait, avec quelqu'un d'autre que moi, que j'apprends par la suite ton comportement ; c'est moi-même qui me chargerait de te donner la correction que tu mérites. Sommes-nous d'accord ? »
Et il n'y a qu'une seule bonne réponse à donner, à ce visage épuisé, mais dont les yeux sont allumés par une sévérité telle qu'il n'en avait jamais vu chez elle, auparavant.
Le temps passa un petit moment sans que ni l'un ni l'autre ne prenne la parole. Chacal avait commencé à se lécher pour secher sa fourrure et tenter de ne pas prendre froid en plus du reste. Finalement Luciole prit la parole pour le remercier de l'avoir sauvée. Il ne répondit que d'un hochement de tête, s'étaler en niaiserie n'était pas pour lui, il préférait ne pas s'étaler d'avantage sur le sujet. Mais Luciole n'avait pas intérêt non plus à oublier un jour qu'il lui avait sauvé la vie, il se chargerait bien de le lui rappeler si tel venait à être le cas. Mais bon, elle lui avait également sauver la vie aujourd'hui donc mieux valait peut-être ne pas trop s'étaler sur le sujet et ne pas le ressasser pour rien.
Il était pris dans sa toilette lorsque la voix de Luciole se fit à nouveau entendre dans la tanière. Mais pour la 1ère fois depuis le début de sa formation, la voix n'était pas douce et agréable, ho non, elle était dûre et intransigeante :
—"Néanmoins, je dois te dire quelque chose. Je te demande de m'assurer que tu ne recommenceras plus jamais ce que tu as fais aujourd'hui. Je te fais la promesse que si cela arrivait, avec quelqu'un d'autre que moi, que j'apprends par la suite ton comportement ; c'est moi-même qui me chargerait de te donner la correction que tu mérites. Sommes-nous d'accord ?"
C'était bien rare de voir le jeune chat admettre ses tords et prendre une engueulée ou une remontrance au sérieux, pourtant ce fut le cas cette fois-ci. Ses oreilles se baissèrent à l'horizontale sur sa tête et il baissa les yeux. Il savait qu'il avait fait une connerie, ce n'était pas la 1ère et certainement pas la dernière, mais celle-ci aurait pu lui couter la vie, et celle de Luciole aussi, et ça, il le regrettait sincèrement et il acceptait de le montrer à la chatte.
—"Plus jamais je ne mettrais la vie de quelqu'un du clan en danger... Je ne savais pas ce que tu avais sentis arriver... J'ai juste penser que l'entraînement avait été trop court et qu'il était trop tôt pour rentrer... Mais jamais je n'ai voulu nous mettre en danger, certes j'ai désobei à ton ordre, mais ton attitude semblait comme d'habitude, je ne me suis pas inquiété du coup..."
Il savait qu'il n'avait pas vraiment d'excuse, qu'il n'avait aucun droit de désobeir à sa mentor, mais il n'était pas totalement prêt à admettre toute la faute. Il savait parfaitement qu'il n'avait pas d'excuse, et que Luciole n'était pas en tord dans cette histoire, mais il cherchait à se disculper un petit peu. Malgré tout, Luciole devait bien admettre qu'il avait déjà admit beaucoup de tord et qu'il regrettait sincèrement sa désobeissance. Enfin, du moins espérait-il que ça suffirait à sa mentor. Il ne voulait pas non plus devoir ramper à ses pattes pour demander pardon, il estimait déjà avoir beaucoup pris sur lui pour faire l'effort d'admettre sa connerie et ses regrets...