Respire... Et... Skate? [pv Rusty] - end

...Entre quitter la protection de la construxion ou attendre aussi longtemps avant de demander son aide à Tonton, Rusty ignorait qu'est-ce qui était le plus idiot.

La tête basse, ployant sous la force de la pluie qui le punissait pour ses choix, Rusty peina à offrir un sourire à son nouvel ami.

— Euh, héhé...

Les gouttes tombaient grosses sur sa tête et ses oreilles, mais plus particulièrement sur la chose à mi-hauteur de ses avant-mains qui les attendait, patiemment, sur le bord de la route.

— Alors, permets-moi de faire les présentations...? C'était toujours un peu embarrassant... Au moins Rusty pouvait se consoler que la pelisse de Tonton ne serait pas seule à ruisseler sur le parquet une fois rentrés... Tonton, je te présente Ollie. Et, Ollie, bah, Tonton.

Il avança sa patte pour la poser sur le dos du skate, et exercer une pression dessus histoire de l'aider à rouler sur l'herbe. Une fois les roues dans la boue elles s'immobilisèrent dedans, et Rusty contourna la planche pour se pencher à son nez, l'empoignant par les dents.

— Voichi l'plan : che vais le tirer avec moi — tout che que che te demande de faire est de poussher dans sha croupe quand il sh'arrête. Ch'est posshible qu'il she cabre ou she mette à ruer. Ollie, il est un peu du chenre... caprichieux!

Ah, que c'était idiot. Rusty le savait, il le sentait, sa poigne sur le skate n'était pas si solide et l'eau la rendait glissante mais il n'allait quand même pas laisser son pauvre skate dormir dehors, et encore moins sous la pluie! Mais c'était quand même franchement embarrassant de présenter son skateboard comme, bah, comme si c'était quelqu'un, quoi...!

Merci Chicken!!!

Tonton... compris.

Il dut comprendre, sans quoi il devait être assez poli pour montrer à Rusty qu'en fait c'était peu de chose et qu'il n'avait pas à se tracasser l'esprit. Ce fut un soulagement, pour lui, et Rusty redouble d'ardeur, rondissant son vieux dos en donnant une meilleure poigne à ses dents.

— Certains de mes enfants avaient des... Bolides comme celui là. Ça faisait un sacré bruit, quand ils traversaient la cour avec ça...
— Ch'est exactement çha! Près d'chez ouam y'avait ch'parc à skateboards et moi et Ollie on y allait shouvent, avec mon humain. On y allait shouvent shans lui, aussi! On shortait tout sheuls, rien qu'nous deux, pour aller voir les j'enfants du coin, Rusty se trémoussa l'arrière-train, rentra la queue entre ses cuisses et OH,   HISSHE!

Ollie, surpris, sortit de sa torpeur. Ses roulettes en avant dérapèrent en l'air un moment mais la poussée de Tonton, en arrière, l'aida à sortir de son trou. Rusty tira trop vite et l'herbe était trop mouillée; il perdit pied dans une danse familière mais il eut assez de présence d'esprit pour lâcher le skate de ses dents qui s'éloigna d'un écart (la contretension).

— HGFH!! Mais le vieil abyssin n'avait pas dit son dernier mot, et c'ets un infatigable Rusty qui fit s'éclabousser l'eau sous ses pattes en tentant de se hisser debout du mieux qu'il le put. Il ne lui servit à rien de s'ébrouer, si ce n'est se remettre de la chute.

...Je l'ai présenté à beaucoup de Claniques, et ils ont tous eus la même réaction, Rusty dit à Tonton, crachant une motte d'herbe et de terre sur le côté, s'abaissant pour retrouver le nez d'Ollie avec ses dents. Ollie les a toush terrifiés.

Ses deux oreilles s'abaissèrent, se tendant vers l'arrière, avec son dos qui refit son arc tout en tirant de toutes ses forces le capricieux "bolide" à les accompagner dans l'herbe haute. Avec la pluie, étonnament, il était coopératif: l'herbe sèche s'agglutinait dans ses roues et lui bloquait parfois "l'articulation". Rusty passait parfois des heures à faire la toilette des pattes à Ollie, afin de s'épargner toute mauvaise surprise.

Merci Chicken!!!

C'était exactement ça, se retint de dire Rusty, car il n'était ni en position pour parler ni en position pour hocher la tête, mais leur tandem allait de bon train et Ollie, malgré quelques réticences, était enclin à les suivre.

C'était exactement ça: les chats de Clans avaient peur de ce qu'ils ne connaissent pas. Les chats de Clans étaient toujours sur les mêmes plates-bandes et se disputaient parfois les plate-bandes des autres Clans mais très peu se permettaient de changer, ou d'ouvrir les oreilles de leur esprit à des choses différentes de ce qu'ils connaissaient. Dans l'expérience de Rusty, ce genre de choses n'était réellement arrivé qu'au compte-goutte, qu'au micro-système d'une poignée d'individus qui l'avait rencontré lui, antithèse de tout ce qu'ils prêchaient sur les chats sans clans.

Le manque rendait mauvais, mais c'était plus que ça. Non seulement le manque rendait mauvais, mais le mauvais se propageait, et quand le mauvais devenait, eh bien, une habitude, la routine, on se battait pour le préserver.

Un frisson prit le dos du vieil abyssin - plutôt que se reculer trop vite, ses pattes furent trop lentes et Ollie tenta d'enfourner tout son nez dans sa bouche. Il était trop large, il se heurta à ses dents -- Rusty se recula en secouant vigoureusement sa tête quant à la douleur qui saisit ses gencives.

— Ack-- PP_FT!     Mais Ollie, enfin!
Ses babines l'élançait, mais Rusty ne put s'empêcher de s'esclaffer: Tu sais, des fois, lui attacher une laisse au cou ou un harnais au corps ne lui ferait pas d'tort, haha!

Merci Chicken!!!

Ollie n'avait beau être qu'un skate, Rusty ne put s'empêcher de lui reprocher son caprice d'yeux gros en réprobation, fronçant ses sourcils blancs. Mais il ne put s'empêcher de sourire, car quand bien même son vieux skate avait encore de la vigueur Rusty ne lui en voulait jamais vraiment. Et avec Tonton, c'était plus facile. (Et aussi, avec Tonton, il ne pouvait pas vraiment se permettre de taper la discussion avec Ollie devant lui, ce serait... ce serait bizarre.)

Tonton profita de cette toute petite pause pour se saisir de la croupe d'Ollie avec ses dents et l'extirper des hautes herbes au profit d'une terre battue, sans doute par les allers-retours de leurs voisins, les chats de la Tribu.

— On devrait pouvoir le pousser jusqu'à ta cabane, comme ça...
— Mais quelle bonne idée, Tonton! Rusty lança à son nouvel ami, avant de détourner la tête le temps de se passer la langue sur ses dents douloureuses, et tenter de cacher le sifflement d'une inspiration sèche entre ses dents serrées.

— Ça va?
— Ouaich-- oui-oui, j'arrive! Rusty ne se saisit pas du nez d'Ollie immédiatement. Plutôt, il lui fit la toilette des pattes, saisissant à dents délicates de longues gousses d'herbe dont il se débarrassa d'un geste leste de la tête. C'est ensuite qu'il se pencha à son nez, serrant un peu plus les mâchoires avant de hisser tout son dos en arc en entreprenant un nouvel effort au recul. Oh, HISSHE -- Ch'est quand même bijarre, cha n'a jamais été aushi...

Rusty fronça ses broussailleux sourcils blancs et sa queue dépouillée claqua la pluie qui vola par goutelettes. Il expia sa frustration par le nez.

— ...D'habitude ch'est plus fachile, quoi! Ch'est ma faute, che n'aurais pas du shortir Ollie shous la pluie...

Mais bon hein, pas la peine de se plaindre, la cabane était juste là, à juste distance, et la terre battue aida les pattes d'Ollie à suivre le rythme sans ralentir ou trop presser le pas et les devancer.

— Je chui content de t'avoir trouvé, Tonton! Et toi, tu dois pas être déchu d'avoir trouvé un endroit où t'abriter, héhéhé!

Mais dans un coin des oreilles de ses pensées, Rusty repensait au sac de croquettes qu'il avait traîné sur la distance séparant le Clan du Vent à la Ville, dans la Maison Vide, et comment il peinait à traîner Ollie en ce moment. Ollie, qu'il avait traîné toute sa vie!

Encore heureux que sa bouche ne soit occupée à tirer, un arrière-goût il arracha une grimace quand il repensa à ses tours, plus tôt, qui étaient sensés être une seconde peau pour lui. Ce n'est pas que Rusty avait oublié que faire du skate nécessitait forcément d'en tomber (on apprenait très vite comment se réceptionner sans se faire mal, et on apprenait très vite à se relever) mais le ratio entre les tours réussis et ceux qu'il avait ratés penchait bizarrement vers le second...

Ou, ou peut-être que ce n'était pas bizarre, peut-être que c'était normal, mais qu'il s'agisse d'un phénomène bizarre ou d'une banalité de la vie, l'opinion de Rusty était la même: il était absolument furieux.

La pluie qui battait sur son dos et sa tête et son museau aidait son poil à ne pas se hérisser devant son nouvel ami, mais la pluie n'aida pas à adoucir l'air dur qu'il donnait au skate en lui déversant (à tort, bien sûr, il le savait, Rusty n'était pas idiot!) toute la faute.

Tu pourrais y mettre du tien, Ollie!

Du nerf, Ollie!

Resaisis-toi, [Ollie]...

Merci Chicken!!!

À ces mots, Rusty retrouva ses dents pointues, motivé à donner un dernier coup de collier. Il remerciait sa prévoyance: avant de partir avec Tonton, il n'avait pas enclenché la porte, ainsi il n'eut pas besoin de bondir à la fenêtre pour l'ouvrir par l'intérieur et rentrer (à vrai dire, la porte ne fonctionnait pas vraiment comme à la maison. La construxion était vieille et faite de bois. Sa porte ne s'enclenchait pas, mais elle était lourde - parfois, trop lourde pour un chat). Arrivés au seuil, Rusty lâcha le skate, cramponna sa patte à l'interstice de la porte et tira de tout son dos pour l'ouvrir grande. Il saisit Ollie par le nez une dernière fois.

"Lâche tout Tonton!" Rusty lança à son nouvel ami, car une fois sur les lattes du plancher Ollie échappa complètement à leur contrôle. Rusty laissa le skate sauvage se dépenser en roulant tout droit, ne s'arrêtant que lorsqu'un impact contre la gamelle de Rusty le fit dévier de sa trajectoire et foncer tête la première vers le nid de draps moisis au centre de la cabane.

Et puis Ollie s'immobilisa, et Rusty se mit à rire.

— Le pauvre, le voyage a du le fatiguer, il plaisanta, son rire manquant d'air.

Dehors, la pluie tombait toujours. Elle avait beau être vieille, des oiseaux avait beau nicher dans les poutres du plafond, leur cabane, elle était solide, et ils pouvaient toujours compter sur sa protection. Rusty sortit dehors pour s'ébrouer et se débarrasser du trop-plein d'eau dans son poil, et puis il se traîna les pieds dans la cabane, outrepassa les restes de leur repas de plus tôt en marchant dans une flaque qu'il avait laissé derrière, ne s'arrêtant qu'à la croupe d'Ollie pour l'extirper du nid et le reposer contre une poutre.

Il inspira d'un coup sec: ses muscles se crispèrent sous son poil tiquetté et Rusty se leva sur ses deux postérieurs et abattit ses avant-mains sur la croupe d'Ollie - le skate se cabra et ses deux avant-roues frappèrent la colonne de bois d'un bruit sourd. L'abyssin acheva son tour sur quatre pattes, soufflant par la nez, pas peu fier de la position dans laquelle il avait coincé Ollie.

— Bien... hhafff... ça... hafff... ça roule, je crois!...

Ou, ou plutôt ça ne roulait plus, ce qui était le but de toute la manoeuvre. Rusty secoua sa tête, rentra (cacha) sa langue dans bouche et se traîna les pieds vers le doudou plein d'eau qui traînait sur les lattes.

— Oh...

Ça lui semblait si triste de le laisser là, sur le parquet, alors qu'il avait toujours pris place dans le cou de Tonton, qu'il lui avait toujours rappelé son appartenance à sa maison... Rusty se tourna vers le concerné, et ses larges oreilles le trahirent en s'abaissant malgré lui. Ce pauvre doudou ne pouvait même pas s'ébrouer...!

Merci Chicken!!!