Ce qu’elle aurait voulu || Coup de Foudre, Bec Croisé, Nuage Brisé, Nuage du Ciel, Nuage de Lycaon & Nuage de la Louve - abandon

Ce qu'elle aurait voulu (lune 67)


La réunion échappait peu à peu de nos pattes. Entre les interrogations de certains chats et l'ennui des autres, plus personne ne faisait attention aux proies à moitié mangées au milieu. Je me ramassais sur moi - même, préférant me concentrer sur ma souris plutôt que sur le fait que Ciel n'aimait pas Flocon d'Amour. Disons que j'aimais bien avoir mes amis et compagnons acceptés par mon entourage, que l'on soit tous un noyau soudé, veillant les uns sur les autres. Même si le principal chat sur qui je devais veiller et qui devait veiller sur moi c'était éloigné de moi depuis note baptême de guerrier... Enfin soit. Je priais que les choses puissent s'améliorer entre la tricolore et la belle grise tigrée. Puis je me sentais un peu coupable. Je savais à quel point je distrayais l'attention de la jeune mentor. Léopapard calma néanmoins les demandes de Ciel, et un nouvel invité coupa la conversation. Ou lui redonna un souffle peut-être.

Coup de Chaleur arriva, attirant à lui Nuage Brisé comme un aimant. Un autre frère de la portée du milieu. Un peu plus de "grands" dans cette assemblée fort jeune. Je penchais mes oreilles quand il nota qu'on avait oublié la moitié de la famille. Disons qu'on avait laissé l'invitation ouverte mais que les présents étaient ceux qui avaient bien voulu venir. La moitié de la famille les avait oubliée aurais-je dit. Mais je préférais glisser une grive au bengal blanc et roux.

" On est là pour manger, pour s'e rappeler des' uns des' autres et pas's'er du bon temps. C'a me fait plais'ir de voir tous mes petits frères et s'oeurs, même s'i on n'a pas grand chos'e à dire ! "

Je m'assis, commençant à ronronner pour détendre l'atmosphère.

" On a de la chanc'e d'être une grande famille après tout. "

Avoir plein de chats, reliés à nous avec un lien fort. Pleins de chats pour s'entraider et se soutenir. Et pour cela, ce repas était important. Pour moi en tout cas, il l'était.

Plus elle grandit, plus le côté rabat-joie de Nuage de la Louve fait surface. Elle déteste l’hypocrisie et compte bien le faire comprendre à tout le monde. Ennuyée par ce repas et ayant vraiment l’impression que personne n’a envie d’être là, elle ne se retient pas pour le faire remarquer.

« - ...Pour manger ?»

J’aurai du m’y attendre. Son père interroge du regard tour à tour chacun des protagonistes de ce repas familial. Revenant sur une précédente remarque de Nuage de Ciel, Nuage de la Louve ne prête pas attention aux paroles de son père.

« - Toi, t’as peut-être pas envie d’être là. Mais Ciel est contente d’être là. Parce qu’on passe pas souvent des moments tous ensemble. Tu pues, c’est tout. »

Un des sourcils de l’apprentie s’arque. Elle commence à avoir l’habitude des attaques gratuites de sa sœur. Elle en a marre de ce genre de réflexions mais elle sait très bien que c’est plus fort qu’elle. Elle ne relève même pas et se contente de soupirer. Après quelques échanges cinglant au sujet de Flocon d’Amour, elle voit que Nuage Brisé se lève et vient à sa rencontre pour donner un coup de langue sur sa tête. D’abord surprise, elle le regarde les yeux ronds puis lâche un ronron, amusée par cet excès d’attention de son frère.

« - Ca fait du bien d'être ... En famille ... »

Nuage de la Louve acquiesce d’un hochement de tête tandis que les buissons s’agitent, laissant place à Coup de Chaleur.

« - Faudrait pas oublier la moitié de la famille alors ! »

Il n’en faut pas plus à Nuage Brisé pour courir et se jeter contre le poitrail de leur frère aîné. Nuage de la Louve le salue de la patte, le sourire aux babines. Plus la discussion avance, plus elle se détend. Cette situation peu familière la dérangeait beaucoup au départ mais elle semble de plus en plus à l’aise.

« - On est là pour manger, pour s'e rappeler des' uns des' autres et pas's'er du bon temps. C'a me fait plais'ir de voir tous mes petits frères et s'oeurs, même s'i on n'a pas grand chos'e à dire ! On a de la chanc'e d'être une grande famille après tout. »

Bec Croisé a raison. Il devait faire de cet atout une force.

« - Tu as raison Bec. Après tout, même si on a pas l’habitude de se retrouver tous ensemble, on devrait essayer de profiter de cette chance, pour elle. »

Nuage de la Louve évoque sans aucun filtre Secret du Firmament, leur mère, décédée peu de temps après leurs naissances. Elle n’a que très peu de souvenirs d’elles et elle aimerait que ses aînés lui en parlent plus souvent pour qu’elle puisse s’identifier et la rendre fière. Après tout, c’est grâce à elle qu’elle est là aujourd’hui.

« - J’aimerais beaucoup qu’on me parle d’elle. Je n’ai que très peu de souvenirs et je sais qu’on fait ça pour elle. Alors … Autant mettre les pattes dans le plat. »

Pourquoi étaient-ils tous ici?

— Pour voir un peu l'autre tête cassé ...

L'autre tête cassée se contenta de hausser les épaules, sans ne rien perdre de son petit sourire. Sa question avait plongé Ciel dans une profonde réflexion, et tandis que Bec se penchait pour manger davantage de la proie qu'il avait chassé, un autre chat les approcha. Le bengal lui porta à peine un regard de côté - il faut dire qu'il ne portait pas vraiment les autres guerriers du Clan près de son coeur - mais ses deux oreilles se redressèrent en reconnaissant ce guerrier comme l'un des siens - c'est à dire, un de ses enfants.

— « Faudrait pas oublier la moitié de la famille alors !
— Chaleur, il le salua de la queue, sans prendre la peine d'enlever son menton de ses coussinets.

Brisé se précipita dans son poitrail, et Coup de Foudre s'en désintéressa, souriant pour lui-même, une part de lui appréciant que ses enfants étaient capables de se combler l'un à l'autre sans vraiment avoir besoin de lui.

Mais c'est Bec qui le mit mieux en mots:

— On est là pour manger, pour s'e rappeler des' uns des' autres et pas's'er du bon temps. C'a me fait plais'ir de voir tous mes petits frères et s'oeurs, même s'i on n'a pas grand chos'e à dire !

On a de la chanc'e d'être une grande famille après tout.

Les oreilles du bengal perdirent leur pep. Et dans ses yeux s'évasa la couleur. Il manquait la pièce maîtresse à cette famille, celle pour qui ils étaient tous réunis.

— Tu as raison Bec. Après tout, même si on a pas l’habitude de se retrouver tous ensemble, on devrait essayer de profiter de cette chance, pour elle.

Grésil dans les yeux. Son dos eut une tension - discrète, malgré le poil ras sur sa peau, qui fit à peine se courber les longues bandes de ses marbrures. Il aurait du s'y attendre. C'était on ne peut plus logique qu'un de ses enfants finisse par poser la question.

— J’aimerais beaucoup qu’on me parle d’elle. Je n’ai que très peu de souvenirs et je sais qu’on fait ça pour elle. Alors … Autant mettre les pattes dans le plat.

Tsk - Louve. Il n'osa la regarder car il voulait changer le sujet, mais une oreille se tourna en ressentant les yeux de Coup de Chaleur tenter de percer au travers de lui. Le bengal perdit sa composition - sa patte, sur lequel il était appuyé, glissa au sol tandis qu'il se retournait sur un flanc, cachant sa fuite derrière une décontraction. Mais il sentait encore Coup de Chaleur insister.

— ... Le Clan parle encore d'elle, non? Qu'est-ce que tu veux savoir de plus, Louve? »

La carte du laisser-faire ne le sauverait peut-être pas cette fois-là, et il serra imperceptiblement les dents.

Dire qu'avant, il adorait raconter des histoires. Ou plutôt,

il adorait lui en raconter.

Un sourire. Une odeur. Et puis plus rien.
La petite femelle n’arrivait pas à se reconstruire convenablement, après tout ce qu’il s’était passé. Le cœur lourd, elle essayait de tourner la page, de continuer à vivre avec les regrets du passé. Malheureusement, ces regrets étaient si lourds à porter que les épaules de la jeune guerrière n’étaient pas aptes à soutenir ce poids. Elle s’en voulait, ô combien elle s’en voulait. Chaque nuit, elle se remémorait la découverte du corps de sa mère. Elle se remémorait le hoquet de surprise qui était sorti de sa gorge, en voyant sa pauvre mère étalée au sol, puis des terribles sanglots à s’en déchirer le cœur, qui avait suivi le hoquet. Elle se remémorait la scène où elle avait tout découvert. Son cœur avait été blessé par la découverte de sa véritable mère, mais avait été détruit à sa mort.

Ses émotions faisaient des loopings dans son cœur et Neige n’arrivait plus à le supporter. Si seulement elle pouvait revenir dans le passé et s’excuser envers sa mère pour ce qu’elle lui avait dit. Elle n’avait pas de souvenir heureux avec sa mère, si ce n’est quelques petites routines dans l’antre de la guérisseuse. Le seul souvenir qui lui restait d’elle lui brûlait le cœur. Elle avait été odieuse avec sa mère, elle le savait bien. S’en voulait-elle ? Oui, terriblement, et sûrement pour le restant de ses jours. Elle n’oubliera jamais le regard peiné de sa mère, la haine qui envahissait la guerrière lors de la découverte du secret, de ce regard noir qu’elle avait porté à sa mère, jusqu’au dernier souffle de celle-ci. Chaque battement de son cœur lui hurlait que tout était de sa faute, que le Clan des Etoiles l’avait puni en tuant sa mère, en lui prouvant que, oui, sa mère avait une place dans son cœur, même si la guerrière souhaitait tant la détester. Neige voudrait la détester, et la Neige du passé aurait probablement continué à haïr sa mère. Mais, le fait que la guérisseuse soit décédée dans le chagrin, en perdant tout ce qu’elle avait de plus cher, ne peut empêcher à Neige d’avoir de lourds regrets et une petite affection pour sa mère biologique.

Encore peinée, elle n’arrive pas à tourner la page. Et seule sa famille compte pour elle, désormais. Elle se doit de réparer les erreurs du passé, qu’importe les sacrifices, qu’importe les efforts. Elle sera prête à tout pour être la grande sœur modèle qu’elle rêvait tant d’être.
Le premier effort à faire : tenter un contact social avec les nouveaux nés de Firmament, avant qu’elle ne périsse. Autrement dit, ses petits frères et petites sœurs. Neige était très remontée contre sa mère pour avoir commis la faute deux fois de suite. Mais, comme ladite mère n’était plus, sa haine était rejetée sur les petits. Certes, elle savait bien qu’ils n’avaient rien à se reprocher, qu’ils n’avaient rien à voir dans l’histoire, mais une part de la guerrière les méprisait cruellement. Ils avaient eu, pendant une fraction de seconde, ce qu’elle avait toujours rêvé avoir : une mère bienveillante, à leurs côtés, qui ne se cachait plus, qui ne feignait plus être morte. Et pour ça, la guerrière gardait un goût amer dans la bouche. Elle méritait d’avoir une mère… Alors pourquoi eux et pas elle ?

La jeune colourpoint sortit sa petite frimousse de l’antre des guerriers, le visage encore fatigué et les yeux aveuglés par le soleil. C’est alors qu’elle aperçut toute sa petite famille, dans la clairière. Elle scruta un instant le petit groupe avant d’y déceler son père, son frère, Bec Croisé, sa sœur, Source de Secrets et… La seconde portée. Elle fronça instinctivement les sourcils. Non non, Neige, fais un effort, bon dieu !
Les petits avaient bien grandi. Elle ne suivait pas leur parcours et n’avait d’ailleurs même pas participé à leur baptême d’apprentis. Leur vie ne l’intéressait guère et la haine qu’elle gardait profondément en elle ressortait souvent lorsqu’elle croisait leur regard. Cependant, elle ne put s’empêcher d’avoir une pointe de jalousie en les voyant discuter joyeusement avec sa sœur et son frère. Son instinct lui criait d’aller les rejoindre, de passer du bon temps avec eux. Mais la présence de la seconde portée la mettait vraiment mal à l’aise et une part d’elle avait peur que cette haine grandissante s’attaque à eux, si elle s’approche trop d’eux.
Cela faisait déjà quelques minutes qu’elle était postée, tel un piquet, devant l’antre des guerriers, en scrutant quelquefois sa famille. C’est alors qu’elle se décida. Il faut entamer la discussion. Ce malaise doit cesser ! C’est ta famille Neige, que tu le veuilles, ou non !

Elle prit un grand bol d’air avant de s’avancer, d’un pas nonchalant, vers le petit groupe. D’un regard fuyant, elle se posta non loin de sa sœur et miaula d’une voix faussement timide.

« Bonjour… Hum, j’espère que ça ne vous dérange pas si je me joins à vous... »

Elle prit bien soin de ne pas jeter un seul regard aux apprentis. Venait t-elle d'arriver au mauvais moment ? Au regard de ses camarades, on dirait bien que oui, mais elle s'en fichait pas mal.

Lycaon haussa les épaules d’un air las face à sa proposition. Il semble dépité, pas particulièrement heureux d’être là mais pas non plus d’être tout simplement ici, vivant dans cette forêt au milieu des autres. Il ne s’intègre pas, ne s’adapte pas — pour des raisons un peu différentes de celles que Source de Secrets à vécu, mais malgré tout, elle le comprend tout de même. C’est aussi pour lui, qu’elle voudrait changer les choses. Et pour toute sa famille. Pour qu’ils puissent vivre sans avoir l’impression d’être un poids, d’être une erreur, peu importe leur constitution, leur force ou leur intelligence. Tout le monde a le droit au bonheur, et un jour, elle leur offrirait. Le monde qu’elle créerait avec Coup de Foudre — peut-être pas de son vivant, peut-être qu’il faudra plus longtemps mais tant pis, un jour, elle en ferait une réalité.

— Pourquoi pas. Si je ne te dérange pas

Elle lui sourit et ouvre la gueule pour lui répondre, mais c’est Nuage du Ciel qui se détache de la conversation, hausse la voix, et attire son attention.

— Dis, Papa, il est possible de changer de mentor si le nôtre est nul ?

Les yeux de Source de Secret pivotèrent vers sa jeune soeur, ronds d’étonnement. Ses oreilles, elles, s’étaient dressées sur son crâne, une de face et l’autre pivotée vers l’arrière quand elle s’était demandé « Mais qu’est ce qui lui passe par la tête ? » Bec Croisé répondit le premier, réagissant plutôt rapidement.

— Pourquoi tu dis ç'a Ci'el ? Qu'est-c'e qu'elle a fait de mal Flocon d'Amour ? Je s'uis s'ûre qu'elle fait de s'on mieux pour toi pourtant.

C’est vrai qu’à ses yeux, Flocon d’Amour n’avait rien d’une mauvaise mentor. Elle avait même du potentiel. La guerrière était à peine plus jeune qu’elle, et même si elles n’étaient pas très proches, la bicolore n’avait jamais vu en elle un élément faible... en fait, elle était même persuadée que comme l’avait si bien dit son frère, elle faisait de son mieux pour sa nouvelle apprentie. Alors pourquoi—

Nuage Brisé apporta un élément de réponse, à sa manière.

— C’est juste que Ciel est une gringrogneuse...
— Ha hah, tu vas te laisser faire, Ciel? ~

Le pli de son oreille vers l’arrière s’accentua davantage. Une quoi ? Elle dévisage Brisé d’un regard un peu confus pour qu’il se corrige, mais abandonne vite cette idée. L’apprenti s’étale sur le sol d’un air triste et fixe Coup de Foudre. Il a sans doute déjà du oublier son néologisme un peu étrange, alors lui demander de le définir serait inutile. Ciel de toute façon reprend des explications concernant sa nécessité de changer de mentor.

— Eh bah, ça suffit pas ! Ciel doit être parfaite ! Et avec Flocon d’Amour, elle le sera pas ! Parce que cette bêta est pas capable de lui apprendre comment défendre le Clan. Alors que c’est le plus important ! En plus, elle est trop jeune pour être mentor !

Source se mord la langue quand la dernière phrase de Ciel parvient à ses oreilles. Elle n’est pas vraiment plus âgée que Flocon d’Amour et c’est pourtant en proposant à Nuage de Lycaon de l’aider dans ses entraînements qu’elle a accidentellement lancé de débat pour le moins atypique et inattendu. Elle en vient alors à se demander si elle est vraiment la personne légitime pour entraîner son frère... d’autant plus que Flocon a été nommée guerrière avant elle — Source ne l’a été qu’à 18 lunes.
Sa reflexion est fort heureusement coupée par Nuage de Louve qui ouvre déjà un autre sujet de discussion, tout aussi... chaleureux et sympathique.

— Quel est le but de tout ça ? Je veux dire … Pourquoi est-ce qu’on se réunit tous si personne n’a vraiment envie d’être là ? Enfin. C’est l’impression que j’ai.

Savoir que sa soeur ressent ce diner de cette manière lui fait mal au coeur, et pourtant... elle ne peut pas nier qu’elle a mit le doigt sur quelque chose de juste. Tout le monde semble tendu, un peu chauffé pour certains, même Source est déjà fatiguée par ce repas et ce qu’elle faisait plus tôt, et se surprend à penser qu’elle préférerait être dans son nid qu’ici avec eux.

— J—

C’est en parti elle qui a rassemblé tout le monde (ou presque), qui a organisé ce repas, et qui tenait à ce que tout se passe bien mais... tout ne se passe pas comme prévu. En fait, ce repas apparaît comme l’epitome de leur famille : un peu cassée, avec un gros manque de communication, et qui ne sait pas où aller. Une partie d’entre eux voudrait aller à gauche, l’autre à droite, d’autre juste rester là et...

— ... Pour manger ?

Son père les interroge du regard, elle et Bec, mais elle lui répond à la négative par un hochement de tête lent, d’un côté à l’autre. Elle non plus ne sait plus vraiment ce qu’ils sont venus faire ici, mis à part manger.

— Toi, t’as peut-être pas envie d’être là. Mais Ciel est contente d’être là. Parce qu’on passe pas souvent des moments tous ensemble. Tu pues, c’est tout.

La guerrière se racle la gorge. Elle aurait sourit et remercié Ciel de son commentaire s’il ne s’était pas terminé... de cette manière. Nuage de Louve à côté d’elle, Source lui offre un coup de langue sur l’oreille, pour qu’elle ignore cette dernière partie qui n’est absolument pas vraie.

— Pour répondre à ta question, Ciel: nan, ce serait contraire à ton précieux Code ~ Oh - à moins qu'elle ne se volatilise, comme celui de Lycaon! Mais tu ne ferais jamais une chose pareille, pas vrai? ♡
— Hm…

Intérieurement, elle ponctue la dernière question de Coup de Foudre : pas vrai ?.

La question de Louve ne sombra pas non plus dans l’oubli, car Nuage Brisé y répondit à son tour.

— Pour voir un peu l'autre tête cassé ...

La tête ca— Ah. Coup de Foudre. Elle toisa son frère en fronçant (pas trop non plus, et avec un regard gentil malgré tout) les sourcils. Ce n’était pas une façon de lui parler. Enfin, il pouvait l’appeler par tous les noms d’oiseaux quand il n’était pas là pour l’entendre, mais son blizzard dans la tête ne justifiait pas de ne poser aucune limite dans ses paroles. Sa colère pouvait bien sûr être légitime, elle ne lui niait pas ça : Il n’était certainement pas, pour la seconde portée, le père qui avait été pour elle, et il était encore trop jeune, sans doute, pour se mettre à la place de leur père pour voir tout ce que leur existence et leur naissance impliquait pour lui.
Il se leva, et s’en alla rejoindre Nuage de Louve. Source se décala un peu pour lui laisser la place et lui permettre de se mettre à côté d’elle, mais il s’en alla plutôt entre Louve et Ciel. Bon

— Ca fait du bien d'être ... En famille ...
— Faudrais pas oublier la moitié de la famille alors !

Elle se redressa d’un bon. Elle reconnaissait cette voix entre mille c’était celle de— Coup de Chaleur ! Elle lui sourit, mais il ne la vit pas. Elle voulu lui dire

— Bon—
— Chaleur.

Mais il ne l’écouta pas. Il n’avait plus d’yeux que pour Nuage Brisé. Source de Secrets s’assied à nouveau, les oreilles basses, puis se baissa pour venir croquer dans sa grive. Reprend toi se dit-elle intérieurement. Tu sais bien que ce n’est plus ta vraie famille. Avec le temps tu n’auras plus ta place ici.
Son coeur se serra. Ses yeux balayèrent l’assemblée de chat qui se tenait devant elle. Et elle eu pendant un long moment le sentiment de ne déjà plus l’avoir, cette fameuse place dans cette famille. Elle n’existait déjà plus pour le frère avec qui elle avait grandi, avec qui elle avait dormi pendant six longues lunes — avec qui elle avait pleuré, avec qui ils avaient tant partagé alors que les trois quart du Clan les détestait pour le simple fait d’exister.
Ta famille a toi, elle est dans la renardière, si on oublie les vers qui vont avec, bien entendu.

Ce qui se dit par la suite parvint à ses oreilles comme étouffé par quelque chose — un bruit blanc désagréable, amené par la soudaine prise de conscience qu’elle n’appartenait pas à ce cercle.

— On est là pour manger, pour s'e rappeler des' uns des' autres et pas's'er du bon temps. C'a me fait plais'ir de voir tous mes petits frères et s'oeurs, même s'i on n'a pas grand chos'e à dire ! On a de la chanc'e d'être une grande famille après tout.

Une grande famille... Si elle prenait sa grive pour aller la manger avec ses deux parents, sa famille serait tout de suite bien moins grande. Mais c’était là la réalité des faits. Sa famille était constituée de deux cadavres — deux morts et peut-être plus qu’ils ne lui avaient jamais dit, mais c’est tout ce qu’elle connaissait d’eux.

— Tu as raison Bec. Après tout, même si on a pas l’habitude de se retrouver tous ensemble, on devrait essayer de profiter de cette chance, pour elle.

À la mention (indirecte) de Secret du Firmament, son regard se tourna vers Coup de Foudre. Il s’était tendu d’un seul coup, mais pas autant qu’elle ne l’aurait imaginé — il devait être préparé à ce que cette question arrive à un moment donné, c’était comme... inévitable.

— J’aimerais beaucoup qu’on me parle d’elle. Je n’ai que très peu de souvenirs et je sais qu’on fait ça pour elle. Alors … Autant mettre les pattes dans le plat.
— Le Clan parle encore d'elle, non? Qu'est-ce que tu veux savoir de plus, Louve?

Ici, il n’y avait personne pour lui parler de Madame Abeille. Elle avait des tonnes et des tonnes de question, mais jamais aucune réponse. Déjà parce qu’elle ne pouvait pas les poser — tout cela devait rester secret — mais aussi parce que personne dans le Clan n’en parlait jamais. Elle n’était qu’une anonyme parmi les anonymes. Une femelle discrète d’un Clan étranger que probablement personne ne remarquait jamais, pas même aux assemblées.
Le sentiment d’être une étrangère s’accentua plus encore, à un point ou, à un moment, il lui traversa l’esprit de se lever pour aller rejoindre sa misérable famille qui était un mensonge de plus, et c’est ce qu’elle se prépara à faire.
Mais une voix la retint.

— Bonjour… Hum, j’espère que ça ne vous dérange pas si je me joins à vous...

Elle se leva finalement, mais pas pour quitter le cercle — juste pour rejoindre sa soeur. Elle frotta affectueusement sa tête sur la sienne, lui lécha l’épaule, puis l’invita d’un mouvement de la queue à venir les rejoindre. Cette sœur là, l’une des seules qui lui restait, elle ne laisserait ni Nuage Brisé, ni toutes les tempêtes, ni tous les mensonges et tous les drames familiaux lui voler. Et même le jour où tout éclaterait au grand jour — où ils apprendraient qu’elle partage du sang de la Rivière, elle ferait tout pour que sa sœur le reste.

— Je suis contente que tu sois venue... lui murmura-t-elle à l’oreille avant de retourner à sa place, tout en lui laissant l’espace qu’elle avait précédemment laissé pour Nuage Brisé, entre elle et Louve.

Elle le pensait réellement : elle était, avec Coup de Foudre et Bec Croisé, un de ces petits maillots qui la rattachaient au Clan du Tonnerre et à la famille qui l’avait vue grandir, quand deux cadavres qu’elle connaissait à peine tentaient de l’emporter loin d’ici.

Quel est le but de tout ça ?
Bonne question Louve, très bonne question. Il ne saurait guère y répondre, faisant lui-même partie de ceux qui n’avaient pas envie d’être là. Pour manger disait leur père. Ce n’était même pas son cas. Il n’avait jamais envie de manger. Le charcoal parla ensuite du mentor de Ciel, qui ne changerait pas, sauf s’il se volatilisait comme l’avait fait Masquée. Et c’est ainsi que sa sœur se plongea dans ses pensées. Comment ne plus avoir Flocon en formatrice tout en respectant le sacro-saint code ? Probablement était-ce la question qu’elle se posait actuellement.

L’autre tête cassée
La fameuse tête cassée. Ne l’était-elle pas, la sienne, un peu cassée ? Son corps l’était sans aucun doute, ce serait étrange que cette dernière n’est pas suivie la tendance générale.

Chaleur se montra, au grand bonheur de Brisé. Lycaon n’avait pas de lien spécifique avec lui. S’il était plus proche de quelqu’un dans ses ainés, c’était sans hésiter de source, de par les visites qu’elle lui rendait dans la tanière de la guérisseuse.

Chance ou malheur ?
Pour Lycaon, aucun des deux. Il avait une grande famille, c’était un constat, une vérité, et puis voilà. Ils étaient là, et ne pas les voir souvent ne changerait pas la donne, ils seraient toujours là, du moins dans son esprit. Donc l’idée de passer du bon temps, sans rien se dire, sans rien tirer de tout cela lui était … paradoxale ? S’il n’avait rien à ressortir de ce moment, alors comment pouvait-il être bon dans un premier temps. Cette envie de présence, il ne la connaissait que pour sa fratrie, et elle ne s’étendait pas au-delà. Cependant, cela ne devait pas être le cas de tout le monde ici présent et il devait faire avec.

Elle…
Plus qu’il ne devait l’admettre, il tendit l’oreille à la suite de la question de sa sœur. Oh oui, ça l’intéressait. Plus qu’il ne le laissait paraître. Il n’avait pas le même manque que Brisé, mais il désirait simplement une idée, une image à raccrocher à ce mot, à ce nom parce qu’elle, elle n’avait jamais été là, même pas dans son esprit.
La réponse de son père n’apporta rien. Rien du tout. Ceux du clan, il sait très ce qu’ils racontaient. Et ça n’avait rien de positif, tout ce qu’ils avaient à la bouche était sa trahison aux Etoiles. C’est bon ça, il l’avait compris. Compris ? Non. Pas compris. Intégré, disons. Cela correspond plus.

Une nouvelle personne se montra. Neige de Minuit. Sa sœur. Apparemment. De la même portée que Source et Chaleur, à ce qu’on lui avait dit. Il ne lui avait jamais parlé, et c’était intentionnel. Pas de sa part. De la sienne.

« Bonjour… Hum, j’espère que ça ne vous dérange pas si je me joins à vous... »

Elle aussi, elle était un regard. Différent de ceux dont il était submergé. Il y avait quelque chose d’autre derrière. Tout ce qu’il savait, c’est que ce regard-là, il ne voyait pas les enfants maudits, il les voyait, eux. Ces yeux-là, il ne se posait pas sur la filiation, mais sur leur personne. Là où ceux de la plèbe étaient dérangés par la cause de leur existence, ceux-là l’étaient par leur existence-même.

« Cela ne nous dérange pas. »

Et Lycaon le pensait. Réellement. Il n’était pas heureux comme Source, ni mécontent. Mais c’était le moment d’avoir des réponses. Le regard, aujourd’hui n’avait pas eu lieu. Car Neige les avait évités. Il le savait, car il l’avait scrutée. Voulant voir ce dernier, pour mieux l’observer, pour bien se confirmer la chose, éliminer la possibilité qu’il se soit imaginé des choses. Mais cette absence, ce silence des yeux, c’était plus qu’un aveu. C’était une véritable preuve.

C’était le moment idéal. Il voulait voir la réaction, devenir un regard à son tour. Peut-être même aurait-il une justification ou un mot de sa part ? Peut-être que la gestuelle lui traduirait tout ? Peut-être que Neige était de celles qui savaient dire les mots qui faut, qui ne se trahissent pas dans leurs actions. Qu’importe. La moindre chose ferait qu’il connaitrait un peu mieux cette sœur inconnue.

« La vraie question c’est de savoir si nous on te dérange. »

Ce qu’elle aurait voulu

Coup de Chaleur avait accordé divers regards et salut ça et là, mais le bengal avait vite du gérer Nuage Brisé... Lequel, non content de ronronner, avait commencer à laver les oreilles de son grands frère, préférant s'occuper à autre chose visiblement. Enfin, le jeune chat avait beau ne pas paraître attentif, il se raidis entièrement quand il comprit qu'on allait peut-être enfin parler d'Elle. S'était sans compter Coup de Foudre ... Et le fils de la seconde porté laissa échapper un grondement qui n'échappa guère à Coup de Chaleur, lequel, d'un coup d'épaule, délogea l'apprenti.

- C'est sur que le clan parle si BIEN d'elle ...

Nuage Brisé pencha la tête de côté pour scruter par en dessous son aîné, lequel, l'espace d'un instant, sembla partager avec lui davantage, le temps d'un regard. mais déjà, Coup de Chaleur ne le regardait plus, s'attaquant à un petit étourneau. Nuage Brisé n'eut pourtant pas encore l'occasion d'en rajouter, voyant venir à eux Neige de Minuit. Une sœur qu'il ne connaissait que de nom tant elle les éviter. un instant, le snow mink fut tenter de l'ouvrir et pourtant, voyant Source réagir, il se contenta de souffler du museau. Si tu dérange ... Nuage Brisé s'était malgré tout rallonger, observant la nouvelle venu un instant avant de reporter son attention sur son père. Il avait fort à dire et malgré tout, une petite voix là dedans lui disait que ce n'était pas le moment. Et si Nuage Brisé se contenait, il fut surpris de découvrir que Lycaon pensait exactement comme lui. Malgré tout et trop content d'avoir une chance de reporter la discussion sur son inconnue de mère, le snow mink se rassit.

- Le clan il sait juste cracher sur Fir'maman, mais ... Elle nous aimait, pas vrai ?

Et une lueur de défi traversa le regard de Nuage Brisé, regard qu'il posa non seulement sur Neige, juste l'espace d'un instant, mais aussi et surtout sur son père. Et pourtant, Nuage Brisé devait sentir qu'il ne fallait guère trop provoquer car déjà, l'apprenti s'attaquait à un morceau de la proie de Coup de Chaleur, trop content, comme d'habitude, d'embêter son aîné ...

Nuage de la Louve sent bien que sa question pose un malaise mais peu importe. Pour elle, il était important qu’elle en sache un maximum sur la guérisseuse qui lui avait donné la vie. Au yeux du Clan, elle n’était sans doute qu’une traitresse mais l’apprentie n’en avais que faire, elle voulait tout savoir, elle devait tout savoir.

« ... Le Clan parle encore d'elle, non? Qu'est-ce que tu veux savoir de plus, Louve ? »

Une autre réponse de la part de son père aurait étonné l’apprentie. Il semblait cependant – pour une fois – ne pas vouloir totalement éviter le sujet. Serait-il prêt à une véritable discussion ? L’apprentie miroite une grande discussion sur sa mère. Qu’est-ce que je veux savoir ? Tout, pense-t-elle.

« Bonjour… Hum, j’espère que ça ne vous dérange pas si je me joins à vous... »

La tête de l’apprentie se tourne en direction de la nouvelle voix qui vient de faire son apparition. Elle reconnaît Neige de Minuit et lâche un ronron. Source de Secrets rompt le rang pour intégrer la nouvelle venue. Elle ronronne et s’installe à côté de sa sœur. L’ambiance commence à peine à se détendre. Ma question est partie aux oubliettes là. L’arrivée de leur sœur ainée permet une nouvelle discussion et de tourner la page sur les mauvaises paroles qui venaient de fuser dans tous les sens. Nuage de Lycaon dit à la nouvelle venue qu’elle ne dérange pas mais il ne peut s’empêcher de rajouter :

« La vraie question c’est de savoir si nous on te dérange. »

Nuage de la Louve fait mine de ne pas avoir entendu son frère. Elle espère secrètement que Coup de Foudre l’ait entendu et réponde à cette attaque visée. Après tout, c’est ce qu’elle se demande tous les jours. Coup de Chaleur assure que tout le monde parle bien d’elle mais Nuage de la Louve et sa fratrie ne semble pas d’accord sur le sujet, si bien que Nuage Brisé renchéri :

« - Le clan il sait juste cracher sur Fir'maman, mais ... Elle nous aimait, pas vrai ? »

Après sa question, l’apprentie se jette sur un morceau de proie de son aîné pour le faire suer. Nuage de la Louve soupire. Elle aimerait avoir un jugement objectif de sa mère. Elle aurait aimé la connaître pour se faire son propre jugement mais cela est impossible.

« - J’aimerai simplement que quelqu’un me dise comment elle était vraiment. Elle mérite qu’on sache après tout. »

Le cœur lourd, Nuage de la Louve se laisse glisser pour s’allonger, la tête posée sur ses pattes. Cette discussion tourne en rond et cela commence à l’agacer. Le sujet qui intéresse toute la fratrie est esquivé au maximum. Alors … Pourquoi faire ce repas de « famille » ?